27.11.06

dyptique première partie





sur une photo Rph A CET ENDROIT et sur une idee d'Akynou ICI MEME

Je me souviens de la barre du milieu. Parce que nous étions trois, à l'arrière, comme des pois dans une cosse. Trois en trois ans. Elle avait pas rigolé, mais nous si, pas mal. On avait beaucoup ri, on s'était battus comme des chiftirs, on avait inventé d'interminables et délirantes histoires à trois, qu'ils écoutaient d'une oreille traînante et ravie. On a beaucoup ri, on les a beaucoup fatigués. Ils étaient fiers de nous. Ils nous ont trimballé dans la moitié de l'Europe. La vie leur devait une revanche, elle dont l'enfance ne devait pas être vue sous peine de mort, lui dont l'enfance n'a jamais été vue par les yeux morts de ses parents.
Nous avons fait des milliers de kilometres et, oui, je sais qu'il faut diviser par trois le temps d'occupation de cette foutue barre du milieu, parce qu'ils tâchaient d'être équitables dans le talage et d'organiser la rotation par paire de fesses.

Il aimait rouler de nuit, franchir des frontières, nous ramener tout d'une traite; on s'endormait en tas, il fallait caler les coudes avec ce qu'on trouvait de menton, et pas de trop de pieds dans l'estomac. On fouissait comme de jeunes chiots, on s'accusait de débordements déloyaux, on chantait des chansons ineptes et d'autres graves à pleurer. Moi j'étais la fille, alors je pouvais renifler. Les garçons étaient toujours un peu condescendants. C'est comme ça les familles, parfois on se partage le gâteau, on peut pas prendre tous la même part.

Mais c'est comme la barre, y a des bouts qu'il faut prendre quand même un jour. J'espère qu'ils ont appris à pleurer, parce que moi, j'ai quand même fini par apprendre à lire les cartes routières.

A l'arrivée, ils nous portaient dans nos lits, il en prenait deux, elle prenait le troisième, au hasard du premier talon qu'ils pouvaient défaire de cette pelote. Ces très jeunes parents avaient compris qu'on pouvaient emmener de très jeunes enfants au bout du monde, parce que leur maison inaliénable, c'étaient ces bras qui tenaient ferme et ce souffle qui scandait la montée de l'escalier.

Bien sûr, quand la revanche à prendre est si grande, on ne reste pas au volant d'une guimbarde.
On ne s'est pas méfiés, elle avait tellement envie d'une résidence secondaire.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

De bien beaux textes ces derniers jours, de bien beaux souvenirs et de bien beaux visages dans ces régions de l'enfance. Précieux moments gardés par devers soi traversés de fulgurantes sensations.
Des bises...

Anonyme a dit…

Je débarque tout juste dans votre espace virtuel Anita en passant par Chroniques Blondes. C'est vraiment un très joli portrait de famille. Chanceuse va! Vous me donnez envie de m'installer ici et de continuer cette lecture.

Tellinestory a dit…

Bienvenue Anne! les chocolats sont à droite du fauteuil. Vous pouvez virer le chat.
Dans toutes les histoires de famille, il y a le meilleurs et le pire. L'essentiel finalement, c'est qu'il y ait beaucoup de couci-couça pour faire tenir...

@still : ;-)) Ouaip, des bises. Non mais...

Anonyme a dit…

Chocolats il y avait, mais qui qu'a tout mangé, hein ?
Hé puis, le chat, certes, mais la fille dessous ?

Moi aussi j'ai connu ces jolis voyages, grace à ma mère, qui sait lire les cartes routières, et à mon père, gens formidables ("Diantre", me diriez vous, mais sisi, ça existe, même si on les traite d'emmerdeurs).
En un peu moins serré, sûrement... Dormir dans les miettes de pain, les ronflements d'une soeur qui dort déjà et les "Mais pousses-toi, tu prends toute la couette" de l'autre. Alors que, bien sûr, c'est elle qui s'enroule dans tout votre duvet. Comme dirait Pépin : Bref.

Ah, que de souvenirs.

Tellinestory a dit…

Chère Huna, vous êtes la bienvenue. Je me perd en conjectures sur P.F.D?
pipelette franchement délurée?
Public follement dévoué?

Anonyme a dit…

Merci à vous, Anita, votre gracieux accueuil me fait chaud au coeur, quoi que c'est plutôt aux chaussettes, en ce moment, que je chauffe, voir crâme.

P.F.D ! Pauvre Fille Délaissée ! Voilà pourquoi je squatte élégamment votre fauteuil. Mais non seulement je suis P.F.D, mais en plus je vais devenir S.F.F. (Sans Fauteuil Fixe), par votre faute.

Honte, honte !

(Et y'a même plus de chocolat. La vie est triste parfois.)