31.12.08

C't'à quel sujet?


(pourquoi pas un petit coup de peinture avant la fin de l'année?)
Un, deux trois, je vais partir sur ce billet, comme on pousse un caillou sur un bitume sans marelle.
Je ne sais pas quoi vous dire, je sais juste que j'ai envie de vous dire.


Un, deux, trois, nous irons où ça?

L'année se clôt et nous attendons, sans savoir si c'est le grain qui vient ou l'écroulement d'un monde. Nous avons tous senti les rafales, ces pattes de chat sèches et rapides qui nous semblent jouer jusqu'à l'arrivée de la morsure.

Un gens-que-j'aime est dans l'attente d'un diagnostic. Je sens sa fatigue à dire, je sens que son premier fardeau est de devoir porter non seulement ses questions mais celles des autres. Je voudrais trouver une forme de silence attentif. Un monde peut-il se porter du bout des doigts?

J'ai laissé mon année de travail finir sans grâce. Sans drame non plus. Je sais un peu mieux ce que je ne ferais pas, parce que, tout simplement, quelque soit la façon dont on le tourne, l'habille et le truque, ce n'est tout simplement pas éthique. Et laissez-moi le temps d'écouter avant de me demander d'agir, ou bien vraiment, vous n'avez rien compris du soin, rien entendu de la plainte qui monte partout.

Quatre cinq six, cueillir des cerises.

En Sibérie, ce seront des framboises. C'est bien, un voyage, dit l'homme aux quatre-vingt seize défauts, ça prend l'avant et puis encore l'après. L'avant a commencé. Je me mets doucement au cyrillique. J'ai rendez-vous avec des ancêtres, mais aussi avec une très jeune fille qui avait quinze ans lorsqu'elle partit seule au Cap Nord. J'ai beaucoup de tendresse pour l'inconscience qu'elle mit à trouver cela naturel. Et je salue rétrospectivement les obscures puissances tutélaires, ou bien quelque chose d'un instinct de survie suffisamment sûr pour frôler un certain nombre de conneries sans les faire.
J'ai trente de plus, maintenant.
Il faut apprendre la prudence et puis s'en défier comme d'une porte ouverte sur le vide.

Les cerises sur les gâteaux.

Ce sont mes filles qui ont fait les gâteaux. Je les trouve belles. Et drôles. Tendres sans être malléables. Hors la toute petite, encore engluée, je trouve qu'elles prennent une place au monde qui leur ressemble pour de vrai.
Mes amis ont mangé les gâteaux. Il y en a de plus en plus à ma table. Ce que le manque d'espace et aussi parfois le manque d'argent a souvent rendu difficile devient, ici, léger. La maison est une bonne maison, contenante. Elle n'intimide pas. Je maîtrise mieux ce qui en moi doit apprendre à lâcher prise.
Cette année a vu passer entre autres, une chevrette qui aspirait au grand air, un peintre en bâtiment, une princesse en sabot... Elle attend une enfant prodigue, un chasseur d'image, l'homme d'un bout de quai, une châtaigne au chat teigne et à la voix de soleil, et, espère, si les courants s'y prêtent un jour, un suricate, un oiseau fin, une île sous le vent, une folle, une blonde, un taxi amphibie, une athée constitutionnelle, un coureur de cartes à jouer, un âne et plein de ratons laveurs.


Sept, huit, neuf, passer 2009.
dix onze douze, viser 2012.

Des adresses jolies pour ce nouvel an ! poussez votre palet jusque à ces tournants, vous ne le regretterez pas :

Une consoeur qui voulait faire dresseuse d'ours. Sans doute les effets du numerus clausus, elle fait généraliste. Et elle est à mourir de rire.
Miss Glu : une dame discrète, pas collante pour un sou, qui fait des portraits subtils sur des post-it. Il y a toujours une forme de question dans ses visages, comme une volonté d'y débusquer les contours de la mélancolie.
J'aime aussi beaucoup Planeth. Ses portraits sont plus affirmés, leur question est différente. Je ne sais pas pourquoi, et il faudrait que je prenne le temps de préciser ma pensée.
Chez "cultive ton jardin",
aujourd'hui, on ramasse le crottin, dans un superbe texte de Vargas. Mais tout le blog est une belle découverte. Il y a, derrière, sous le pseudo, quelqu'un de très bien.
Et puis, allez donc chez Dame Ciorane. Sa cuisine est de quatre sous, et parfois de quatre sous moins trois. Elle a peut être mauvais caractère. Mais du genre de cactus qu'on aime tous ici, épines dehors et fleurs bien protégées dedans.



A vous tous qui me rendez la vie plus douce, plus intéressante, plus émouvante, qui me faites rire et réfléchir, qui me donnez envie, portez vous bien, prenez soin de vous. Que l'année vous soit douce.

25.12.08

Tout compte fait, les contes de fées.

(photo Yves Barré)
Normalement, ici, aurait dû se situer un post sur "comment l'Esprit de Nouillel vient aux mères".
Ce moment où, après avoir vaguement ronchonné, biffé des tâches à faire sur des listes volantes, médit de toute espèce de fêtes organisées, on s'aperçoit que c'est finalement plutôt bien, que les enfants grandis, non seulement mettent la main à la pâte, mais l'inventent, la parfument et la décorent, avec une surprenante gourmandise et qu'au bout du compte, cette maison qui sent le vrai sapin, la sultane et le cookie chocolat-pandan, c'est bon pour le nez et le sentiment de famille.

J'aurais tâché de vous enrober cela, de gommer ici et de relever là, parce que c'est un blog, ici, pas l'ensemble de ma vie. C'est un regard complémentaire, pas une biographie. Les proches qui jettent un oeil ici en apprennent peut-être plus sur Anita que vous n'en savez sur la personne en dessous.

Et c'est pour cela que vous n'aurez pas le post prémédité.. Je viens d'assister à un téléscopage explosif de ma vie à cookies et de ma vie à pixels, qui me laisse sulcul.
Mais c'est à cause de tous vos commentaires précédents que vous aurez celui-ci.

Ils l'ont fait.

En moins d'une semaine, entre le moment de publication de ce post et aujourd'hui, ils ont réseauté, comploté, chuchoté, coopté et ils m'ont flanqué dans la face le résultat de mes divagations transbaïkaliennes. Ils s'y sont mis à plein, et ça comprend la frimousse de la plus petite qui accepte de se passer de sa mère pendant trois semaines, la malice de la toute jeune adulte qui fait ce qu'elle veut de sa paye, na!, la famille large, la belle famille, les marâtres, les fillâtres, l'homme aux 98 défauts.

Et moi, j'suis sulcul.

J'ai failli refuser devant l'importance de ce cadeau. Il n'y a que sur la toile qu'on joue avec l'idée d'un mécène. D'abord parce que dans la vie, ça n'existe pas, ou bien c'est louche et ça ne mérite qu'une esquive polie. Et puis, faut dire que j'ai clamé haut et fort que ce serait le Noël de la décroissance.

Mais ce ne sont pas des mécènes, ce sont mes proches. Ils ne viennent ici qu'avec discrétion, avec respect. Je sais très bien ce que dit ce cadeau : il dit que le but importe moins que la mise en chemin, il dit que malgré la certitude qu'aucun voyage ne peut tenir lieu de voyage, il faut savoir parfois déchirer le tissu du quotidien. Il dit que probablement, nombre d'entre eux ne trouveraient aucunement plaisant de passer dix jours en train, mais qu'ils ne discutent jamais ce qui fait bonheur à l'autre.
Il dit que ces gens raisonnables, posés, inscrits, aux manières courtoises, modestes dans leur apparence, sont pour une part dissimulée mais réelle, absolument francs-barges, joyeusement foutraques, insoucieux des normes, désintéressés et aimants.

J'ai bien tenté de protester. Mais la réponse a été sans ambiguïté : " tais-toi, foulcamp et ramène des photos."

Regarde de tous tes yeux, regarde.


PS1: l'homme aux 97 défauts est quand-même prudent. A ces dix mille kilomètres, il a adjoint un cadeau d'attache : une magnifique paire de sabots, de vrais boutou pic fait ici.
Boutou-coat, tu es une belle hypocrite! Quand je pense à ton oeil clair et innocent quand j'ai parlé de sabots! ;-)))

PS2: Elle gouaille, Anita. Mais l'autre, hier soir, elle pleurait comme un veau. (Je sais, pleurs trrrrès utiles pour fairrrrrrre Michel Strrrrrrogoff.)

PS3: Y a-t-il quelqu'un qui parle russe ici, boljémoï?

18.12.08

Paris-Irkoutsk


Vous êtes un lectorat fidèle, amical, souvent discret, drôle, chaleureux, indispensable, généreux.
Et vous ne roulez pas sur l'or.
C'est bien dommage.
Mais qui sait? Tassili a bien trouvé, pour son petit nouel, un bel homme, un vrai, avec deux b ... avec tout ce qu'il faut pour accrocher l'étoile et danser tango.
Peut-être, parmi vous, dans les silencieux, les masqués, les furtifs, il y a ce trésor de Golconde :

Un mécène.

Désintéressé.

Pété de thunes.

Culpabilisé, peut-être, d'avoir continué à gagner de l'argent en Bourse, malgré la débâcle. Ou bien enivré d'avoir touché le gros lot. Ou encore, vous avez hérité des 500 millions de la Begum et la coïncidence avec ce post est trop forte pour que vous hésitiez.

Car le cadeau de mes rêves est ici : un voyage de Moscou à Irkoutsk, sur les traces de Michel Strogoff.

Je me fous que ce soit en groupe, donc avec des gens qui ne sauront même pas quelle passionnante blogueuse je suis, qui n'auront peut-être même pas lu Jules Verne sur la fourche d'un arbre en pleurant comme un veau sibérien quand la lame de Feofar Khan s'avance vers les yeux bleus de Michel, et qui se plaindront du confort du train sans rien connaître de la différence entre un tarentass et une télègue.

Oui, oui, Perm est sans doute une ville industrielle et le Baïkal infesté de moustique...
Oui, oui.

Mais c'est Michel Strogoff, c'est la Sibérie, c'est le Transsibérien, ce sont des noms de villes qui furent les tapis volants de mon enfance et de mon adolescence, Nijni Novgorod, Kazan, Omsk, Irkoutsk.

C'est : "Regarde de tous tes yeux, regarde"
Et c'est :
En ce temps-là, j'étais en mon adolescence
J'avais à peine seize ans et je ne me souvenais déjà plus de mon enfance
J'étais à 16.000 lieues du lieu de ma naissance
J'étais à Moscou dans la ville des mille et trois clochers et des sept gares
Et je n'avais pas assez des sept gares et des mille et trois tours
Car mon adolescence était si ardente et si folle
Que mon cœur tour à tour brûlait comme le temple d'Ephèse ou comme la Place Rouge de Moscou quand le soleil se couche.
Et mes yeux éclairaient des voies anciennes.
Et j'étais déjà si mauvais poète
Que je ne savais pas aller jusqu'au bout.



Et peu importerait que vous ne ressembliez pas à l'impavide géant blond, je calerais mon visage contre la vitre du train et je regarderais de tous mes yeux, je regarderai et je serais en route.
La cadence du train, si vous savez vous taire, nous servira de coeur commun, il y aura des plaines et des forêts de bouleaux transparentes, et des femmes à chaque gare, nous apporteront du pain frais et du thé. Nous mettrons le morceau de sucre dans notre bouche et nous nous ébouillanterons la gorge. Cela durera vingt-quatre jours.
De retour sur le quai de Paris, vous n'en saurez pas plus sur moi-hors le fait que vous auriez rendu un être humain intemporellement heureux.


Mais vous êtes mon lectorat fidèle, amical et désargenté. Je vous aime comme vous êtes parce que vous savez, comme moi, voyager d'un mot et de quelques rêves. Peut-être certains d'entre vous sont descendus au premier paragraphe.
Pour les autres, il n'y a nulle urgence à revenir à notre point de départ.
Si vous êtes bien, si le wagon est assez chauffé, votre écran point trop embué, nous pouvons poursuivre avec Blaise Cendrars et la petite Jehanne de France jusqu'à Kharbine, en Mandchourie ou même, échangeant le flegme de Michel contre le sourire en coin de Corto, ne descendre qu'au bout de la rêverie, à Shangai.
N'oubliez pas, cette fois-ci de prendre votre tasse de thé à deux mains.
Bon voyage, et prenez soin de vous.

17.12.08

c'est vert, mais juste

Donc, le feu est vert, chez Gilsoub ou Jathénais, pour voter pour les trois photos qui vous plaisent le plus. Cette fois le thème était une couleur, mais je vous dirais pas laquelle. Comme d'hab, c'est un crève-coeur de choisir. La dernière fois, j'en ai même oublié de voter à force d'hésiter. C'est mal.

14.12.08

rumeurs.


Durant ma semaine, j'écoute des gens. Le soir, je lis des gens.
Ça bruisse, ça chuchote, ça crie, ça pleure parfois trop et souvent pas assez, ça pose des mots abrasifs, liés de colère sourde et de vie qui ne renonce pas, ça boit, beaucoup, beaucoup trop, ça fume en disant merde et souvent, ça tente de s'arrêter, ça file le joint avec un sourire, et des fois, ça fait les comptes de tout ce qui est parti en fumée, ça partage le café, discute la confiture, échange les mômes, cherche l'âme soeur, ça rompt, ça attend en débordant à plein coeur de joie et de peur de s'égarer, de ne pas plaire, ça se trouve trop vieux et ça hésite, ça remonte avec rage le cours des ans, ça regarde les passants dans la rue, ça prend des photos, avec émotion, avec ironie, avec attention, drôlement, poétiquement, cruellement.

Ça peint, ça dessine, ça gribouille, ça met de l'encre, du sépia, de l'aquarelle, du feutre, de la bombe, sur du papier, des post-it, l'envers d'un paillasson, un meuble, un mur, un amer solitaire, sous la peau. Ça esquisse, griffonne, estompe, brouille les lignes, surligne, surjoue, cherche son chat, trouve des chats, décrit des chats, attends des enfants, les perd parfois, les pleure, comme on peut, jamais comme il faut, ça se serre, le coeur, les mains, les coudes , autour de la peine, ça laisse échapper des bêtises, ça fait comme ça peut, ça tend l'oreille, guigne du coin de l'oeil, ça sourit en coin, pousse du coude.

Ça rit aux éclats, ça se marre, ça pleure de rire dans son verre, ou dans celui du voisin, ça se moque, ça daube, ça se traite, la switch à bitch, ça plume, ça habille pour l'hiver, ça s'attendrit, ça se laisse émouvoir, ça se tait, pas longtemps, ou au contraire trop longtemps, ça enterre, ça détourne les yeux, ça se referme, ça arrache la page, ça déclare que c'est fini, foutu, qu'on ne l'y reprendra plus, ça s'éteint, ça lâche prise, ça abandonne. Ça se fait un sandwich et ça clôt le sujet.

Ça resurgit ailleurs, autrement, dans la génération suivante, sous une autre identité, ça ouvre un autre blog, ça reconnait la forme d'une oreille dans la foule, ça trouve des ressemblances avec la grand-mère, ça lance une incantation, ça fredonne un très vieil air, ça tâche de se souvenir, ça rit encore, ça boit encore trop, ça discute à n'en plus finir, ça partage, ça raconte, tout, le boulot, le mari, le chum, l'amante, le coming out qui s'est mal passé, la grand fête, le rendez-vous, le demi-sourire, le quart de jonc, la cuisine, la variante de la recette, ça raconte, ça cause, ça écoute, ça répond, ça intervient, ça fait un signe, ça en écrit mille, ça se donne à voir, à lire, à sentir, ça se touche, c'est touchant même quand c'est pas très bien lavé et que ça ne parle pas tout à fait la même langue.
Ça bruisse, sans fin, partout. C'est fatigant et puis ça fait du bien.

A cette commune marmite, je verse ce soir, quelques coquillages, la mer froide et belle, la roselière gonflée d'eau, un premier essai de guimauve maison, un peu molle et parfumée, une table de 5, une rangée de bottes bleues sous le sapin, des cookies au parmesan et olives vertes à se rouler par terre, un ami qui viendra peut-être, le clocher de la minuscule chapelle de Saint Vio, la pelure d'orange séchée qui flambe entre les bûches et peut-être, aussi, mon amour de toute cette vie.


9.12.08

mes nuits sont souvent plus givrées que mes jours


J'aime les manuels de savoir vivre. Non que je différencie une fourchette à bigorneau d'une pelle à homard, ni que je ne me soucie de plier mes serviettes en mitre d'évêque.
Mais je leur trouve un charme désuet et une vertu prophylactique : ils jettent une lumière cruelle et sans appel sur toute amorce de désir d'être un jour rich and famous. A la simple idée de qui il me faudra fréquenter et de quelle manière, je retourne sans regret aucun à mes verres dépareillés, mes spaghettis à l'ail et au pain de l'homme aux 99 défauts.
Reste une douce fascination pour l'art avec lequel les hommes se rassurent sur leur appartenance, en se compliquant la vie de toutes les manières possibles.
Pourtant, même en feuilletant abondamment cette littérature, il est un sujet sur lequel je n'ai pas trouvé de réponse et qui pourtant, mériterait de l'être.
Je ne dirais pas qu'il me hhhante, mais enfin, il s'agit d'un point subtil dans la symphonie du jeu social, et qui n'est abordé nulle part.
Ni chez la Berthe Bernage, ni chez le Goujon qui, pourtant, nous promet un Manuel de l'homme bon ton, ou cérémonial de la bonne société, comprenant, Des notions sur la manière de faire les honneurs d'une table, sur l'art de dépecer et terminé par un choix de jolis jeux de société, et de rondes à danser avec les airs notés, ni chez la Rothschild.

Je livre donc ma perplexité à votre sagacité :

Faut-il prévenir une relation que vous avez rêvé d'elle?

Je conçois que cela ne pose pas de problème en ce qui concerne l'Elu(e) de votre coeur.
Le "Chéri (e) j'ai rêvé de toi" tend à affermir une histoire débutante, rassure le partenaire qui fréquemment se laissera aller lui-même à une douce rêverie en imaginant combien il fut magnifique dans votre nuit. Il ne cherchera pas à voir plus loin, et vous n'êtes pas obligé de lui dire qu'il était vêtu d'un pagne fait de foulards Hermès vintage représentant des fourchettes à bigorneau.

Mais le collègue de travail n'a-t-il pas droit à une explication devant votre coup d'oeil en dessous de la ceinture et votre air immédiatement soulagé, puisque après vérification, il porte bien un pantalon? A moins que vous ne pouffiez subitement devant sa cravate ornée de pelles à homard.

Le rêve prémonitoire ne doit-il pas être immédiatement communiqué à celui qui en est l'objet? Si j'ai rêvé d'une chevrette attachée à une guirlande, broutant le chapeau (rose avec des étoiles vertes) de Mr Diafoirus, ne dois-je pas en avertir l'amie que cela concerne? (ta radio va être normale, mais si tu ne la fais pas, qu'est-ce que tu vas te faire enguirlander!)

Bon, tout ceci n'est que gaudriole et vous savez que chez moi, ce n'est qu'un chapitre de mon manuel de savoir masquer.
J'ai rêvé d'un ami.
Un ami? sur le cadastre de mon existence, sa place est minuscule, son empreinte à peine visible. Un griffonnage, mais si curieusement alerte, précis. Dois-je lui cacher que, dans ce rêve, il a, l'espace d'un sourire et d'un regard, incarné tout ce que l'amitié offre d'intemporelle sécurité, de connivence paisible, d'humour bienvenu et de liberté. Le tout, très correctement vêtu.
Dois-je le lui dire?

Ermine de Clermont-Tonnerre, Baronne Staffe, aidez-moi! Mânes d'Erasme, bloggueurs compatissants, venez à mon secours!


Ps: il est des cas où, bien sûr, la question ne se pose même pas. Si vous rêvez de Dieu assis sur la bibliothèque du présiprince, vous savez bien que ni l'un ni l'autre n'existe. Et si vous rêvez de Kouchner assis sur la déclaration des droits de l'Homme, vous savez que vous ne rêvez pas.

7.12.08

D'autres questions qui n'appellent pas réponse...


Il y a deux sortes de bonnes journées. Celles pendant lesquelles on fait tout ce qu'on a faire. Et celles où l'on finit par se dire qu'elles ont tellement démarrées dans la flemme que la seule façon d'en faire des journées parfaites, c'est de ne vraiment rien faire jusqu'au bout.
Donc une journée consacrée à me demander :
  1. -si la quantité de fromage à tartiner dans une portion individuelle est calculée en fonction de la surface d'une biscotte, ou si c'est le contraire.
  2. -si je suis la seule à éprouver une profonde jouissance, l'ivresse d'un pouvoir élémentaire et grandiose parce que j'ai maintenu, puis réanimé un feu particulièrement mal-né, en refusant absolument de voir que le temps passé à souffler, ajuster la brindilles, titiller la maigre braise aurait été plus utilement consacré à le démolir pour le reconstruire.

4.12.08

La vie, c'est pas du gâteau.

Exactement le soir où j'avais envie de vous raconter que le ciel était énorme, gonflé d'un gris de cendre et de bleu violent, un ciel que je croyais n'exister que dans les pays tropicaux, ou juste avant la catastrophe.
Vous dire que dans cette journée où tout m'a échappé, mais alors, absolument tout, j'ai fini secouée d'un rire sans issue et que quand la pluie s'est déversée, j'aurais bien tout noyé dedans, le bébé avec l'eau du bain, les chiens de ma chienne, la tartine dans le manque de bol et l'aïeule dans le varech, jusqu'à ce mon pied droit me rappelle à la réalité. Je l'ai égoutté, et je suis rentrée.
L'homme aux quatre-vingts-dix-neuf défauts avait fait le pain. Ça m'a séchée sur pied.

3.12.08

Bis repetita

Habituellement, je ne réédite pas mes billets.
Mais après tout, s'ils rééditent leurs conneries...
Celui-ci est un de mes premiers, pour l'occasion, je vous l'assortis d'une illustration musicale de choix.



BANDITS, VOYOUS,VOLEURS ET AUTRES CHENAPANS.



Je vous engage, si d'aventure vous passez ici, à lire,
A CET ENDROIT
les raisons de la pétition "Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans".
Vous y lirez que certains d'entre nous se verraient dans l'obligation professionnelle de discerner chez leurs patients, dès le plus jeune âge, les caractéristiques suivantes:
" la froideur affective, la tendance à la manipulation, le cynisme » et la notion « d’héritabilité (génétique) du trouble des conduites ».
Après quoi, nantis de bons conseils, de médicaments appropriés, de méthodes éducatives, et d'outils de contrôle social performants, nous pourrions rêver de purger de toute trace de délinquance, notre société qui profite si bien à ceux qui savent s'en servir.

Toute?

Hélas, même si ce plan orwellien venait à voir le jour, il est à parier que de nombreux villages lui résisteraient encore et toujours.
Des villages pas nécessairement gaulois d'ailleurs. Certains sont monégasques, panaméens, bahaméens, voir franchement multinationaux.
Car la délinquance la plus fréquente, celle qui coûte le plus cher à nos sociétés, nous privant des hôpitaux, des routes,des crèches que nous méritons, qui ôte le pain de la retraite de la bouche nos vieux, c'est quand même bien ce qu'on appelle la délinquance en col blanc.
Il est bien sûr plus tentant d'imaginer, sous le mot délinquant, la figure roublarde, provocante, et de préférence basanée de celui "qui a des airs de te tchourrer l'oxygène"*, que cette pâlotte réalité:


S'il y a , vraiment, un lien organique entre ces symptômes et l'entrée dans la délinquance à l'âge adulte, ce à quoi " la froideur affective, la tendance à la manipulation, le cynisme » vous mèneront le plus sûrement, statistiquement, c'est à la fraude fiscale. Passant parfois, d'ailleurs, par l'hémicycle.

Dépistons, dès trois ans, les comptables retors, les hommes d'affaires avisés, les élus corruptibles!!!

*"Double peine": Zebda

2.12.08

l'humeur en notes

L'humeur du jour, c'est ça, exactement:


Merci de vos commentaires, j'y répondrai plus précisément, mais, là, j'ai égaré quelques neurones dans cette journée. Pitêtre dans ma chaussette droite?

30.11.08

Et pendant qu'on discute socle commun, dans nos écoles...

Selon Cultive ton jardin, des policiers ont investi l'ecole du jardin de ville, à Grenoble pour y emmener trois enfants expulsés avec leurs parents dans la foulés.
Dans un Lycée Professionnel du Gers le 17 novembre, des gendarmes accompagnés de chiens policiers investissent une classe à la recherche de drogue.
Je n'arrive pas à mettre en ligne le témoignage du professeur, mais on y perçoit bien son inquiétude devant l'attitude de forces de l'ordre qui considèrent le tout-venant comme forcément suspect.
Dans Libé, cette phrase de Churchill, citée à propos de l'arrestation de son ex-PDG : "dans une démocratie, quand on sonne chez vous à 6h du matin, c'est forcément le laitier."
Nous sommes nombreux à penser que dans une démocratie, quand la police vient dans une école, c'est pour en protéger les enfants.
"Où va-t-on Papa?
Je sais pas mais on y va."

Edit : ce ne s'est pas passé dans un Lycée professionnel mais dans un centre de formation pour apprentis (CFA). Ça change pas grand chose aux propos-sinon que c'est une population encore plus vulnérable. Justement le public que la prévention de ce genre maintient dans un genre d'excitation complètement à l'encontre de but visé. M'enfin ce que j'en dis... Qui suis-je auprès de ces éminents spécialistes? quelqu'un qui avait été recruté aussi pour ça? Ah bon?

Edit 2: Merci à Mlle Moi qui me fournit ce lien.

29.11.08

Rester un médecin sans cible.


Bon.
Ben voilà.
La visite des 6 ans, dans sa forme ancienne, a vécu.
Le département dans lequel j'exerce, dont l'une des spécialités non culinaire est la résistance sous forme de petit village gaulois narquois a tenu bon dernier, mais maintenant, c'est fait.
Nous ne verrons plus, indifféremment, sans distinction, le pauvre, le riche, le grand, le petit, le public, le privé, l'agile, le pataud, le rieur et le secret, l'enfant de prof et l'enfant de putain, celui du quartier Est et celui du Nord, le trilingue et le mutique, l'obèse et le moineau, l'alpha et l'oméga au milieu de beaucoup de petits couci-couças.

Désormais, nous ferons, comme le reste de la France, des "visites ciblées". Pan! j't'ai vu, allonge-toi!

Le plus curieux, c'est que vous allez trouver, dans les lignes qui suivent, un plaidoyer pour le systématique, alors même que dans ma réalité, dans ce qui constitue mon quotidien réel, ces visites ont fini par me faire tartir à un point prodigieux. Le nécessaire dépistage du langage les ont beaucoup formatées, au point de rendre parfois difficile la possibilité de création d'une vraie rencontre et les items répétitifs, commencés en début de saison et de journée dans la bonne humeur, finissent par être le genre de pensum qui annihile complètement la pense-femme que je suis.
Et, bien entendu, quand je découvre sur mon agenda, qu'après avoir casé toutes les visites de maternelles, il me reste, sur toute l'année, vingt-huit jours ouvrables pour répondre aux demandes de quatre collèges, deux lycées généraux, deux lycées professionnels et une trentaine d'école primaire, vous saisirez sans peine qu'il y a une forme de soulagement à imaginer autrement son année.
Mais quand même.
En fait ce qui rend insupportablement lourd ces visites, ce n'est pas leur conception, c'est l'absolu manque de médecins pour les réaliser, sans qu'on soit obligé de choisir entre le systématique et la demande, entre le chalutage et la pêche à la ligne.

Pour répondre à un problème quantitatif, on modifie sérieusement cette visite sur la plan qualitatif.
Nous ne ferons plus de dépistage. Nous travaillerons sur ce qui a été dépisté par d'autres. Pour nous, c'est une modification conséquente: je ne me fierai plus à mes yeux, mes oreilles et mes mains, mais aux yeux et aux oreilles des enseignants, des infirmières et des membres du Rased (oui, ne pouffez pas, ceux-là même qu'on veut supprimer), et peut-être, en sus, aux mains de mon collègue de PMI, à condition qu'il continue, lui, à les voir tous.
J'ai la chance de travailler cette année avec des infirmières que j'estime très compétentes. Au point d'hésiter sérieusement devant cette nouvelle responsabilité qui leur échoit.
C'est en partie au vu de leurs données que je déciderait s'il faut, ou non, un examen approfondi.

Rude responsabilité aussi pour moi, sur des bases que je ne maîtrise pas encore, de déclarer qu'un enfant ne me semble pas devoir être vu. Bien sûr, dans un certain nombre de secteurs, certains enfants n'avaient aucune visite.
Mais franchement, ne pas faire d'examen, est-ce que cela vous fait la même chose que de recevoir de la part d'un médecin un avis rassurant?
Ben non.

Je ne m'inquiète pas pour mes découvertes de hasard, qui auraient forcément donné lieu, un peu plus tard, à une consultation. Les enfants, sauf exception, sont bien suivis.
Je m'inquiète des effets que ce ciblage aura sur le coeur même des échanges. C'est vrai qu'on me renvoie un peu sèchement parfois, que l'on a pas besoin de moi. Soit parce qu'on estime que son enfant va très bien, soit parce qu'il va suffisamment mal pour être déjà entouré d'une foultitude d'acteurs. Dans un billet de Tili, on voit bien que le dilemne d'un médecin contrôleur de la sécurité Social est le même. Soit il contrôle impartialement, au risque de provoquer des réactions douloureuses-avais-je besoin de cela?-ou bien il cible et il annonce par son geste même, avant toute relation : " je pense que vous truandez".

J'ai toujours essayé, quelque soit le contexte, de faire en sorte que ces visites systématiques apportent une forme de plus-value à mes patients. Soit parce qu'émerge un vrai problème, soit parce qu'on balaye une inquiétude qui n'avait pas lieu d'être. Parfois, c'est juste dire à un parent qu'il a bien travaillé et fait un beau petit en pleine forme. C'est peu? Allons, il faut savoir cultiver aussi le narcisse en pot, c'est excellent pour la santé...

Mais l'aspect universel de cette visite me permettait aussi de rassurer les parents malmenés, inquiets, précaires, fuyants . Ceux qui amorcent un mouvements de retrait, refusent haut et fort ou bien n'envoient pas l'enfant à l'école. C'est vite vu d'en faire des parents maltraitants. Ils ont plus généralement peur d'être jugés. Dans ces cas là, je vous jure que je suis bénigne, obtuse, niaisement obstinée,souriante et rivée à mon objectif. "J'vous comprend bien, ma bonne dame, mon bon M'sieur, mais moi, j'sus obligée, sinon je me fais super méga disputer par ma chef qu'elle est horrible".
Je vous passe les détails de mes stratégies d'arapède. J'arrive à moins de 2% de refus dans lequel on peut trouver 1% de situations visiblement inquiétantes sur lesquelles j'alerte et 1% de variables qui nous permettent de dire qu'on n'est pas dans une république bananière.
Ceux-là, les furtifs, je vais sans doute les perdre, sauf à trouver de nouvelles stratégies.
Je me creuse aussi la cervelle pour savoir comment garder une prise sur l'autre bout de la chaîne. Ceux qui n'inquiètent pas, parce qu'ils sont tellement dans le désir de se conformer au désir des adultes à leur égard, qu'ils y laissent la peau-ou plus souvent l'intestin, tétanisé, en vrac, chaque matin avant d'aller à l'école. Ceux qui sont tellement perfectionnistes qu'ils pleurent d'un trait tremblé, d'un rond imparfait. Ceux que je surveille du coin de l'oeil, parce que je me demande toujours comment l'adolescence va passer là dessus, lequel d'entre eux constituera une vraie défense phobique, ceux chez qui des troubles alimentaires sont déjà présents. Ceux-là ne me seront pas, a priori, signalé par l'école et encore moins par les parents.
Sauf si.
Sauf si je me bouge pour inventer quelque chose qui soit acceptable pour moi et pour les patients que je veux intéresser à me rencontrer.
De toutes façons, je n'ai pas le choix. Le cadre m'est imposé. Il s'agit d'un mouvement amorcé , il y a déjà plusieurs années et qui atteint enfin le dernier département qui s'y refusait. Mon choix n'est pas faire ou ne pas faire, mais comment faire pour sauvegarder des enjeux qui me semblent précieux, dont je sais qu'ils se situent dans la tache aveugle de l'administration.
Si cela n'est pas possible, je pense que je m'en irai. Ce n'est pas pour faire plaisir à l'institution que je me préoccupe d'aider les enseignants à mieux comprendre les enfants différents et le poids des pathologies sur les apprentissages. Si je le fais, c'est parce que dans toutes les séquelles qui peuvent résulter d'une pathologie, la séquelle scolaire est l'une des plus lourdes.
Mais je ne conçois pas que notre présence ne doive servir qu'au dépistage de ce qui entrave les apprentissages. Sous cette forme, c'est une cannibalisation des enjeux de santé au profit de la seule institution.
Cela fait 15 ans que je m'emploie au service des élèves. Avec le sentiment que pour un médecin, il n'y aurait point de sotte niche écologique et qu'il est important d'occuper celle qui vous échoit avec honnêteté, conscience et pragmatisme. Mais je crois n'avoir jamais perdu de vue l'enfant. Ni les parents.
J'ai bien le sentiment que ce changement me déloge. Je ne veux pas me répandre en plaintes. Mais je veux comptabiliser clairement ce que je refuse d'abandonner en route.
Il est possible qu'on vienne essayer de me convaincre qu'il s'agit de choses de peu de valeur, que notre société a tout intérêt à les laisser tomber parce qu'elles se sont révélés, à l'usage, encombrantes, peu utiles en terme de santé publique.
Bien d'accord sur la bandelette urinaire, que je n'ai jamais pratiquée.
Mais en ce qui concerne les vulnérables d'entrée de jeu et les hyper-adaptés qui y laissent la peau et les os, je vous préviens :
pour me convaincre qu'il ne faut plus s'en préoccuper, va y a voir du boulot.


PS: malgré tout le mal que je pense de la capacité de ce gouvernement à gérer les problèmes de santé, ce qui se passe là n'est pas de son fait. Mais vous avez le droit de dire qu'il n'a rien fait contre. Qu'il s'assied gaillardement sur ses propres lois, puisque cette visite est prévue dans la Lolf. (lol!) et que les trois bilans promis en vue d'améliorer la protection de l'enfance, c'est du pipeau.

27.11.08

Rome - Cambridge


J'aime le café.
Je l'aime noir et serré, sans sucre.
Je l'aime comme une halte, comme une invite, comme un rythme.
Je le propose à celui que je veux séduire, je le tends à ceux que j'accueille.
Je le hume au matin et parfois, je le goûte sur la bouche de l'autre.
Toujours, j'en laisse au creux de ma tasse, comme une offrande au dieu du retour.
J'aime le café, du nez et de la langue, de toutes les brumes dissipées, de la vigilance de chat donnée au cours des longues nuits de garde, de veille, de quart.
Mais
franchement,
je ne connais pas de chagrin d'amour
pas d'angoisse existentielle
pas de brèche d'amour-propre
Qui aient résisté
à trois amples tasses de thé
avec des tartines beurrées.

26.11.08

Du son chez l'âne.

L'âne Onyme, profitant de façon anticipée, de la nouvelle cellule de veille de l'Education Nationale, écrit ici une lettre ouverte fort pertinente au ministre concerné. J'approuve d'autant plus que je me suis moi aussi construite autant contre qu'avec cette bête-là, et que si j'y reste, c'est pour coincer les pieds dans la porte en tâchant d'éviter que les enfants ne s'y coinçassent les doigts.
Une forme de suite plus tard si j'ai un peu de temps.

22.11.08

Descriptif dubitatif.



-la manif?
-Contre la baisse d'effectifs.
-Positif?
-Palliatif.
-Le PS implosif?
-Intempestif.
-L'exécutif?
-Impulsif, improductif,abusif. Un approximatif shérif convulsif.
-Le législatif?
-Au pif
-Les plumitifs?
-Poussifs.
-Les dispositifs expulsifs?
-Itératifs. Vomitifs.
-Mmm ... Le psychoaffectif dépressif?
-Négatif. Plutôt végétatif. Contemplatif.
-Pff. tout ces substantifs en if, c'est bourratif!
-Plus Kouglof que Pilaf.
-Et côté bénef, c'est pas bésef.
- Pouf-pouf. Alors, quoi tu'f?
- Bof. Je coinduf. C'est jouissif.

20.11.08

infinie jalousie



Ouiiiiiiin! j'veux la même!
(trépigne, trépigne)
Vous voyez, là, dans la boucle droite... juste le petit creux où lire à l'écart...
(soupire, soupire)
retrouver mes préférés
(rêve, rêve)
avec un café, et pt'ête un macaron ou deux
(grossis, grossis)

Ouinnnnnn, j'peux pus sortir!

Tant pis. Tiens , les nouvelles de Stevenson... Longtemps que je ne les avais lues.
Ah oui... aller manifester demain... Finis ma page et j'y vais.

17.11.08

Réforme de la psychiatrie : "J'irai chercher la santé mentale avec les dents!"

Comme bon nombre de médecins, j'ai sauté en l'air-pas de surprise, non, on s'y attendait- lorsque le Présiprince, à la suite d'un fait divers tragique impliquant un schizophrène a déclaré, dans son style inimitable qu'il allait nous pondre illico une réforme de la psychiatrie.
J'attends encore, depuis la révélation d'un autre fait divers, tout aussi dramatique, impliquant un membre de sa famille politique, qu'il promette une réforme de l'UMP.

C'est vrai, certains passages à l'acte me trouvent plus compatissante que d'autres. Je ne le nie pas, et souvent, je m'en interroge. A la vie publique, il m'arrive de prêter une oreille différemment accordée selon les cas. Je vois bien bien qu'il m'est de plus souvent possible d'utiliser des outils de compréhension professionnelle. Ils ont l'avantage de me laisser sceptique peut-être, mais sans rancoeur.
Mais parfois, je ne peux, ou ne veux pas. Je me laisse mettre en colère. Je sais parfaitement que c'est inutile, mais tant pis. Je serai une sage nonne Taoïste dans une autre vie. (La troisième après celle de ménagère ordonnée aux armoires pleines de linge sentant la lavande)

Je vois bien que cela a à voir avec ce que je pressent comme un pouvoir de nuisance d'amplitude variable.
Derrière le premier fait divers, j'entends la terreur, l'envahissement par les voix, la lutte incessante, pied à pied, contre la menace intérieure et le passant qui passe par hasard, prendre le rôle de l'ennemi dans cette histoire folle. Je connais notre impuissance, l'irréductibilité de la souffrance humaine, qui se contrefout des effets de manches et des rodomontades.
Sûrement, en toute logique avec moi-même, je devrais entendre la même chose dans ce deuxième fait divers. Mais j'ai beau faire, le bruit qui en monte me raconte l'histoire d'une fin de toute-puissance, l'histoire d'un après-moi-le-déluge, l'histoire d'un homme qui croyait posséder une mairie et un être humain. Elle me raconte l'histoire d'une vision politique de l'être humain aux antipodes de la mienne, d'un système qui broie les faibles de telle façon que les anciens forts n'ont plus d'autre recours que le sursaut haineux, quand ils viennent eux-mêmes à défaillir.
Cet homme-là a-t-il songé une seule fois à offrir son aide, a-t-il songé une seule fois à en demander?
Le choeur de ceux qui crient au crime passionnel, prouvant bien qu'ils en font une circonstance atténuante que jamais ils ne reconnaîtront à la misère et à la maladie mentale, qui sont les mêmes qui démolissent pierre à pierre ce que le service public avait d'un peu généreux- et prévoyant-me donnent envie de faire provision de bois vert, et de m'en aller le leur casser sur dos.
Peut-être la compassion me viendra néanmoins. Cette bête est surprenante. Tiens, je me suis presque surprise à en ressentir en lisant la lettre de JM Le Pen à Carl Lang...
Cette réthorique boursouflée, ce trépignement rageur de chef suprême d'un parti fantoche, cet aboiement édenté ! Un monument, mes amis!
Il est urgent de créer un asile pour vieux Matamores emphysémateux, pour Tyrans sans public, pour presque-Maîtres-du-Monde poussés à la retraite. Mixte, oui.

13.11.08

des cailloux pour Kozlika


Bon anniversaire, belle Dame.
Quelle heureuse rencontre, ces petits cailloux et quel bonheur, ce rappel que l'amitié peut vous saisir aussi simplement qu'une pomme sur une branche.
Je t'embrasse.

9.11.08

ceci est une photo couleur


Et l'horizon là-bas
comme un trait
sur notre miroir
nous consolant
de n'être que des segments.

7.11.08

Miettes de temps.


(collage Jacques Prevert, exposé dans sa maison de Omonville la Petite)

Aujourd'hui, journée sans consultation.
En l'absence de patients, ça fait quoi, un médecin scolaire?
Si elle a une secrétaire, ça pourrait préparer une action de prévention, ou se former à l'une des bizarreries récemment identifiée dans sa patientèle.
Mais quand elle n'a ni secrétaire, ni internet, elle fait ça :

Arriver au centre médico-scolaire, pompeuse appellation d'un boui-boui laissé à l'abandon jusqu'à ce que j'arrive sur le secteur.
Ramasser le courrier, lancer le répondeur.

Courrier :

Un retour d'avis fait pour un bilan orthophonique chez un enfant dont la manipulation des sons me semble médiocre. Le psy du CMPP me répond qu'il s'agit d'un enfant fragile mais charmant. Il me la baille belle. Si j'étais un mec je dirais : voilà qui m'en touche une sans faire bouger l'autre. Ranger l'avis dans le dossier. Indiquer : "lecture à surveiller."

Un bilan orthophonique, un vrai, étalonné et tout, pour en enfant de CE2 en échec complet sur la lecture, vif comme un écureuil. Score pathologique partout. Prévoir une équipe éducative, un jeudi soir de préférence d'après les indications de la maman. Agenda : Gneuhh, dans trois semaines minimum. Ranger.
Trois demandes de dossier, dont une mal orientée. Trouver les deux dossiers en archives, inscrire le nom de l'enfant, la date de naissance, l'école initiale et l'école qui demande le dossier dans le répertoire "Dossiers envoyés". Bénir les deux départements, le mien et celui de destination ne pas exiger l'accord préalable des parents avant envoi de dossier. La loi sur la transmission des informations médicales et le secret partagé n'a jamais été pensé pour notre mode d'exercice qui cumule exigence de veille sanitaire et secret professionnel. Faute de cadre, chacun y va de sa ratatouille en priorisant ses courgettes personnelles.
Fourrer dossiers et demande dans une enveloppe. Prévoir d'aller à la mairie pour déposer le courrier
Mettre de côté la demande égarée pour l'apporter au collège idoine la semaine prochaine. Savoir qu'on a deux chances sur trois d'oublier.

Deux avis d'ouverture de session de formation premiers secours. Ranger dans la pochette idoine itou. Soupirer, parce que ma contribution se résume exactement à cela depuis un an : mettre les avis dans la pochette. Idoine. Si on prend la bleue au lieu de la rouge, ça vaut pas.

Fin provisoire du courrier.

Téléphone
:
Appeler Mme Z. Le projet personnalisé pour son fils a été rédigé il y a un mois. tout juste s'il ne s'était pas terminé par une embrassade collective. A ce jour, rien ne semble avoir bougé, et l'enfant se déprime. Savoir que cela peut être une vue partielle de la part d'une maman inquiète. Savoir que cela reste tout à fait possiblement exact. Reprévoir une réunion. Ecouter. Tenter d'être rassurant sans être lénifiant. Apprécier la courtoisie de la dame, malgré sa tension.

Appeler l'école. Sur répondeur. Merdoum.

Répondre à Mme Y. Sa fille m'en veut très fort. Doit rechercher activement s'il existe une poupée à mon effigie et des épingles. J'ai prêté l'oreille à quelques unes de ses copines qui s'inquiétaient de la voir couper les grains de raisin en six et écarter les petits pois de plus de trois mm de diamètre. Elle change d'établissement. J'explique patiemment que cela ne fera pas revenir les règles de sa fille, aux abonnés absents depuis assez de temps pour qu'on s'en inquiète. Pas convaincue. Un blanc quand je dis, avec douceur, que je travaille aussi dans l'autre établissement. et que je veux bien prendre pari qu'à la première semaine de cantine, j'aurais au moins un surveillant pour m'interpeller.
Griffonner un bref compte rendu, le glisser dans l'agenda. Ne pas oublier de le ranger dans le dossier qui est encore dans le premier établissement. Le temps que je m'en souvienne, le dossier aura glissé vers le deuxième établissement.

Savoir qu'à la fin de l'année, quoi que je fasse, j'aurai le même nombre de bouts de papier éparpillés un peu partout. Fort heureusement, mon écriture est la garante du secret.

Appeler l'école N. : oui, l'enfant D., bien qu'ayant bénéficié d'un passage anticipé en CP, a bien eu une visite médicale en même temps que les enfants de maternelle. En profiter pour régler quelques petits détails matériels en vue de ma prochaine visite.


Divers:



Accueillir l'infirmière qui vient de terminer le dépistage des CE2. Faire avec elle la liste des enfants qui nécessiteraient un avis de ma part. Asthme sévère, obésité, enfant qui apparait triste et négligé, agitation majeure, enfant qui a eu un bilan cardio et qui dit ne pas pouvoir courir, sans qu'on sache pourquoi, ratons laveurs, moutons à cinq pattes, éléphants blancs, moineaux. Regarder l'agenda. Blêmir.

Sortir des dossiers pour y jeter un coup d'oeil avant la réunion de cet après-midi avec la psychologue scolaire. Me demande si je vais apporter une couronne. Me décider plutôt pour des petits palets. Le Rased fournit le café.

Me rappeler brutalement que je suis déjà hors limite pour fournir mon état de frais de déplacement. J'abomine absolument cet exercice. Le tant, partie de, à telle heure, revenue ici à cette heure là, avec la voiture immatriculée nananananan, à verser sur le compte toujours le même depuis trois ans, au stylo bl- calamité, orage et disgrâce, où est mon stylo bleu?? Que la Grande Gidouille Ubique patafiole ces tétratrichillotomes!

Préparer mes visites de lundi. Sortir les dossiers, vérifier les feuilles de tests, les piles de l'otoscope, celle de l'audiomètre, le scotch pour la toise, la balance, le chronomètre, les crayons de couleur, les échelles d'acuité visuelle, le test de vision des couleurs, le sthéto, l'appareil à tension, le marteau à réflexe.

Tiens, un stylo bleu.

Fin de la matinée.

Vous vous êtes ennuyés?
Moi aussi, un peu.
Mais moi, j'étais quand même payée pour ça.
Gniark.

5.11.08

yes, they can.


Ce matin, on avait le choix entre deux possibilités, entre deux réveils, entre deux paysages du monde.
Je n'étonnerai personne en disant que Mac Cain m'évoquait une frite baignant dans des huiles recuites. L'idée d'une troisième mandature républicaine me semblait une idée couvercle, basse et lourde et franchement, je croisais les doigts.
J'aimais mieux l'idée de la chance.
L'élection d'Obama n'est pas une révolution, c'est une bonne nouvelle. Il décevra, forcément, parce qu'on ne peut pas s'empêcher de croire que quelqu'un, quelque part, possède une clé et bien sûr, ça ne marche jamais comme cela.
Les forces qui travaillent une société, que ce soit les pesanteurs économiques, les limitations des ressources naturelles, le sentiment d'appartenance ou d'exclusion, la transformation des positions d'homme et de femme, des places données à l'enfance, à la jouissance, à la règle, au groupe, à l'individu, à la filiation, à l'idée du bonheur, de la sécurité, de la menace, du maintien de l'homéostasie, la recherche des moindres coûts et celle du dépassement des possibles, la perception de notre temporalité, tout cela, bien sûr, ne peut être contenu dans les mains d'un seul homme.
Tout cela fermente continuellement, souterrainement, n'arrivant à nos yeux qu'au moment de leur cristallisation.
Et il n'y a de politique visible que symbolique. Mais ces symboles, justement, ne sont pas des riens.
La façon dont une politique les agence, choisissant de mettre en lumière des perspectives obligatoirement partielles, mais pas indifférentes, ce qu'on priorise, les liens qu'on fait, nos indicateurs, cela dit quelque chose de notre vision de l'humanité.
Et mine de rien, cela a des effets tout à fait réels.
Finalement, je crois que la politique, c'est comme les mères : il n'y en a pas de vraiment bonnes, on peut juste essayer d'éviter les calamiteuses.
Oui, à choisir, je préfère me réveiller le matin en me disant que, pendant que chez nous, c'est peut-être un futur président qu'on expulse, là-bas, des gens vont se sentir environné d'un sentiment bizarre qu'ils mettront quelque temps à identifier, une effluve jusqu'alors inconnue, ou plutôt qu'on croyait réservée aux autres : une autorisation.
C'est vrai, on peut?
Ben tiens!


PS : Par ailleurs, je dois dire que j'ai été bluffée par la sobriété, la dignité de la réaction de Mac Cain. Je suis peut-être candide, mais je l'ai trouvé extrêmement authentique, bien loin des rodomontades fatiguées et pathétiques de nos perdants.
Décidément, ne pas réemployer ad nauseam son personnel politique battu doit avoir des effets sur l'élégance des défaites...

1.11.08

ceux qui prennent pirou pour un homme


Kikadi que je n'y étais pas?

En tous cas, demain, je vais à Paris...
Et je verrai la Dame qui ne m'a pas vu à Pirou.
you!

29.10.08

Méditation du jour.

Quand le sage montre la lune, il y a toujours des gens pour fixer l'idiot qui regarde le doigt. En ricanant.

23.10.08

lumières.


Chez Gilsoub et Jathénais, il y a des lumières.
Comment en choisir une?
En dehors de celle, atroce, d'une cabine d'essayage de maillot de bain, y a-t-il de laides lumières?
Ce n'est pas la première fois que j'hésite dans cet échange amical de coins de rue et images du monde, tant j'ai de plaisir à voir la variété infinie que soulève un même thème.
Mais la lumière?
Quand j'étais toute petite étudiante, j'avais un appartement sans confort. Mais lumineux.
Le suivant fut haut, très haut perché. Mais lumineux. Le troisième était bruyant. Mais il s'inondait de rose et de pêche au levant et au couchant.
Plus tard, j'eus une maison avec de toutes petites pièces. Et quinze ans de travaux forcés. Mais de ma chambre avec sa stable et douce lumière du nord, je pouvais suivre dans une enfilade en biais de portes gris clair, les lumières de sud et d'ouest jouer sur la chaux jaune et le jardin vert.
Et maintenant, j'habite un endroit, où dix, vingt fois dans la journée, je lève le nez avec un extraordinaire sentiment d'appétit. Le bleu, le gris, le doré si large des heures du soir me fait l'effet saisissant d'un pain d'épices ou d'un macaron. Aucune photo ne vous rendra le compte exact de cette brume sur la rivière, qui change le vol du héron en signature aérienne d'un tableau magique, le velouté des feuilles lavées d'impalpable crachin, ni le grand, l'immense bleu paisible de cet été indien et consolant.
Ce qui ricoche sur un sable si blanc qu'il en est cassant. Ce qui s'attarde aux pignons. Ce qui s'émiette dans les sous bois. Ce qui brille dans les interstices et reste au creux des rochers. Ce qui veille, comme l'oeil de la mer.
La lumière, les lumières. Toutes. Accidentelles ou programmées. Le même "aah!" de contentement devant l'arc en ciel ou le feu d'artifice. Le même sentiment d'une faveur imprévue, le même ravissement.

La photo que je vous livre ici n'a aucune valeur technique. Pensez juste à moi, riant de voir que décidément, dans ce pays où je vis, il fait ensemble soleil et pluie dans l'espace et l'instant d'une flaque d'eau...

Alors, je les aimes toutes, ces photos de là-bas. Je vais me donner encore un peu de temps. Mais n'espérez pas me voir faire un choix éclairé...


PS : vous avez le droit de voter, vous aussi. Pour savoir comment faire, c'est là.
PS 2: oui, oui, je sais. Ça s'appelle refiler le bébé.

22.10.08

un pont par hasard



Le passant sur le pont
a la tête à l'envers
l'eau elle-même
en est troublée
Il s'en excuse:
je ne fais que passer.
Moi aussi dit l'eau.

21.10.08

Wannabe a wallaby!

Hier soir, au moment de repas, Fille Cadette, me voyant grognonne et probablement encore secouée de colère devant l'état du monde, entreprit une manoeuvre de diversion efficace.
Elle me raconta comment le pet de kangourou allait le sauver, ce monde.

Cela n'a pas raté.

Le repas est parti totalement en vrille, des croisements de vaches folles et de kangourous narquois se sont mis à sautiller sur la table, de très vieux éleveurs attrapèrent de bizarres maladies professionnelles à force de compter leur rebondissant troupeau, on calcula la hauteur des clôtures, on dessina de très jolies petites cornes pointant hors de poches marsupiales imprimées de marguerites et on rit à lessiver un tas de vieille crasse .
J'ai perdu 6/7eme de mon autorité de mère en pouffant mon gratin dans mon verre.

Un peu plus tard, me baladant dans les vertes prairies du WIWLF*, je tombais sur cette vidéo d'anthologie. L'un des fondateur du Parti de la Loi Naturelle est un éminent confrère au doux nom de Dr Frappé. (Encore qu'il apparaisse dans d'autres liens comme juriste, mais on va pas chipoter.)



Bref, du kangourou ou du gourou, je ne sais qui sauvera le monde, ni lequel des deux dilate le plus la rate, mais je sais ce qui rapporte le plus.
Dès ce soir, je fonde une secte. Reprenez avec moi : "wanabee a wallaby!" .
Et que ça saute.


* What I Was Looking For


Edit : grâce à Meerkat, qu'est une spécialiste de la bestiole (si vous ne craquez pas sur celle qui illustre son billet du jour, j'vous veux même pas dans ma secte!),
une magnifique illustration de la révolution en marche: Allez, on sautebroute!

19.10.08

dimanche.

Josiane Nardi, 61 ans s'est immolée par le feu pour protester contre l'expulsion de son compagnon, Henrik Orujyan, 31 ans.
Elle est morte de ses blessures, il a été libéré.

De cette sècheresse biographique, celui-là tirera un roman. Il sera âpre et plein d'ellipses.
Celui-là se déchargera en plaisanteries grasses sur la différence d'âge, l'aspect peu recommandable du jeune homme, et ce sera plein de sous-entendus flottant à la surface comme de vieux pneus.
Celle-ci en fera un combat renouvelé, et ce sera plein d'appels désespérés à des souvenirs anciens, à des limites maintes fois franchies.
Il y aura un, deux, dix billets comme celui-ci, ils seront tristes et incompréhensifs, plein du sentiment de n'être qu'à l'écume de cette chose terrible.

Dans tout ces cas de figure, nous maintiendrons à distance le scandale, l'inabordable singularité de ces deux vies, la rage et le remord, le sacrifice et la folie, la peine humaine et la violence des lois de la peur, le point de bascule, l'ivresse, le feu, l'histoire et la chair consummées.

Sur qui, maintenant, repose le poids? Aurais-je voulu d'une liberté à ce prix là? Mais qui voudrait d'une détention payée en vie humaine?

Assez.
Assez.

Edit : on peut voir, ici, le clip de c'était pire demain

17.10.08

celui qui parle peu


Celui qui parle peu, souvent,
laisse sous ses pas
l'équivoque sillage
d'un qui vivrait sur ses réserves
d'un qui observerait derrière ses paupières
comme sous le filtre de persiennes
défiantes et protectrices
d'un qui jugerait à huis clos
nos brouillons irréfléchis.

Si je parlais peu
je marcherai
toujours au ras de l'écume
ou bien je gribouillerais
ou bien encore
dans un atelier silencieux
éclairé de biais
j'ordonnerais des pièces
minuscules et compliquées
avec de très petits outils d'horloger

Mais je parle beaucoup
des fois même
je lève les bras
et j'use de l'anathème
avec des grand cris.
Alors je dis
que celui qui parle peu
est un homme empêché
un profiteur
de la parole de l'autre


Je ne veux pas voir
combien je me fatigue
et comme j'aimerais
un jour
être le caillou
plutôt que le torrent.

16.10.08

Pourtant c'est simple.

La France, c'est simple, on l'aime ou on la siffle.

15.10.08

placebo


Je ne sais pas si vous êtes fan de prix, mais je vous conseille de vous intéresser aux IgNobels, décernés chaque année comme leurs sérieux prédécesseurs.
Il s'agit d'une vraie mine pour creuser un peu plus le génie humain et ses dégâts collatéraux.
Par exemple, l'IgNobel décernés, il y a une dizaine d'années, aux jeunes Eclaireurs de France réunis en brigade anti-graffitis pour avoir soigneusement effacé des peintures rupestres dans une grotte, me semble un excellent point de départ pour aborder les dangers d'une trop sourcilleuse hygiène morale.

Je ne suis pas sûre de pouvoir vraiment utiliser l'expérience de Mulet, Benedito, Bon & Rosselló sur la vitesse des ultrasons dans le Cheddar en fonction de la température, mais par contre, le prix décerné à Dan Ariely me semble tout à fait intéressant.
Il semble avoir prouvé une chose au fond nullement étonnante pour qui a déjà un peu travaillé la question: plus un placebo est cher, mieux il marche.

C'est toujours passionnant, cette histoire de placebo. Cela n'a rien à voir avec un effet imaginaire, ni avec un sentiment subjectif. Et ça marche aussi en effet négatif. Par exemple, je crois que c'est chez Grange Blanche qu'était mentionnée une étude tout à fait éclairante. Un médicament, destiné à être l'équivalent féminin de la tite pilule bleue du bonheur à l'équerre, présentait un certain nombre d'inconvénients : virilisation de la voix, augmentation de la pilosité... Effet par ailleurs constaté chez 14% des femmes sous placebo. Quand je vous dis que c'est passionnant!

Mais au fond, je me demande si, au lieu de l'Ignobel de médecine, Ariely n'aurait pas plutôt mérité celui de l'économie :
Pour que ça marche, il faut que ça coûte un prix fou et que le prescripteur y croie aussi.
Dans le pataquès actuel, il semblerait qu'il manque un élément.

13.10.08

Sois sage, ô mon insu et tiens toi plus tranquille...


J'ai un insu.
Enfin, comme tout le monde, plusieurs, bien entendu.
Certains sont issus de mon plein gré, comme ceux qui dérivent d'ici. Naissant des mots ou des images, il en folâtre quelques uns chez vous et j'approuve de ne pas savoir toujours s'ils vous font rire, rêver ou penser au dîner du soir.
Les insus d'ici sont toujours une promesse vague, mais réconfortante, un fil d'Ariane tricoté à d'autres, insus tissus sans souci.
Sans souci, parce que sans figure, flottants en quelque sorte.

Or récemment, me sont revenus, presque incidemment, un, voire deux insus, d'un modèle éminemment rebondissant.
Quelque chose aurait pris place là bas. Je ne sais pas quoi d'ailleurs.
A mon insu s'est joint quelque chose de moi et cela mène sa vie, avec une certaine malice.
Je ne crois pas à l'innocence de l'insu.
Peut-être à son initiale insouciance, oui, mais à sa malice plus encore.


Que faire?

Un insu qui prend figure, un insu su est toujours infiniment troublant, déconcertant et précieux à la fois et quelque peu embarrassant.
Surtout quand c'est chez un monsieur qu'il a élu domicile.
Parce que bien sûr, mettez vous à ma place, on ne peut s'empêcher alors, et totalement à l'insu de celui qui héberge le vôtre, de laisser son imagination prendre le dessus.
Et comme je rêve à votre insu, le rêve est pour moi flatteur.


Est-ce doux? Est-ce amer? Est-ce que cela se comporte comme un familier? Ou bien comme une épine irritante et butée?
Est-ce que cela souffle en rafale, en soulevant les feuilles mortes de votre seuil?
Est-ce que cela s'insinue en chuintant?
Est-ce attachant et inopportun comme un jeune chiot?

Y-a-t-il seulement un chat à fouetter?

Est-ce vivace, ou bien suffira-t-il de le mettre en lumière pour l'éteindre?

Allons, vous voyez bien ce qui, de votre insu au mien, se renvoie en souriant, ce qui, de vous, à pris place chez moi : il rôde, autour de cet insu masqué, de la curiosité tentée tenue en laisse, de la douceur effilochée en rêverie, un sentiment de responsabilité de ce qui s'est échappé...

Rendez-moi mon insu s'il vous dérange. Je le reprendrai sans discuter. Mais s'il vous plaît de le garder, s'il est sur le point de se transformer en souvenir désarmé, soyez-sûr, vous qui l'avez hébergé, que mes pensées vous accompagnent.

12.10.08

Mehr licht!

Tinou a choisi la lumière.
C'est donc le thème du chic-des-clics, que tout le monde peut faire, voir, commenter, voter, séparément ou à la fois chez nos amis Jathénais et Gilsoub.
Pour ma part, j'hésite.
Entre ce qui s'éteint et ce qui s'allume.






Entre le génie humain et la beauté donnée du monde
Entre comotive et zoizillon.

On va laisser fermenter.

Récession : premiers effets.

Mon cher Diogène m'envoie ceci dans ma boîte:

11.10.08

Mouvements browniens


Du vrac dans les nouvelles de ce matin : la mort de Jörg Haider, Ingrid Bétancourt qui croit ferme aux rentes du malheur, et la panique des traders.

Des évènements forts différents mais qui me laissent un peu le même sillage. L'envie de dire " tout ça pour en arriver là?".
Cette agitation haineuse pour finir avant soixante ans dans un fossé, sans même savoir si le médecin qui tente de vous réanimer est juif ou pédé-gouine, deux de vos cibles de prédilections?

Tenir des années durant dans des conditions matérielles épouvantables pour finir otage des petits fours commandés trop tôt et d'un pré-communiqué-sous-embargo qui vous ridiculise aux yeux-même de ceux qui se sont réjouis de vous voir libres?

Avoir cru et fait croire aux gogos que ÇA pouvait grossir indéfiniment et qu'ils suffisait d'être plus malin pour en avoir une plus grosse que le voisin et finir dans une débandade de fourmilière sur laquelle on pisse en criant fébrilement des appels au calme tout continuant d'amplifier le mouvement?


Les amis, je vais planter mes tulipes. C'est peu, mais c'est toujours ça de pris à personne.

9.10.08

Zen beaucoup ce que vous faites...



Il fait un temps radieux.
Une visite s'est décommandée.
J'ai fini plus tôt.
J'ai fait le convoi des filles pour l'école ce matin, c'est donc la voisine qui s'occupe du retour. Comme souvent, nos enfants font tartines communes au goûter et c'est chez elle aussi, cette fois.
J'ai donc tout le temps de savourer un thé en vous écrivant, sur ma terrasse.
Le travail de la journée ne m'a pas foulé le neurone, mais à suffit à rassurer le censeur en moi, toujours prêt à m'accuser de 'ien fout'.
Le lascar que j'ai vu a fini par me dire qu'il faisait parfois autre chose que se prendre le bû avec ses profs, voler à coup de poing au secours de l'incompris et faire le con avec son scooter. Il écrit aussi. Et bien. Nous avons parlé longuement et c'est finalement lui qui a demandé que je l'examine. Presque par courtoisie, me semble-t-il. Ou bien pour replacer l'entretien dans un cadre.
Il y a du plaisir à poser des gestes sans urgence, rituels. C'est aussi un métier manuel.

J'ai aussi à planter des tulipes très noires et des scilles bleues.

Rappelez-moi, dans quelques semaines, que je viens à cet instant précis de faire provision de fragments suaves.
Pour la route.

8.10.08

bal de prom, pub, plogue :

Profitons donc du passage accru ces jours-ci pour emboucher les Trompettes de la Renommée pour y flûter un là discret.
Deux blogs photos que j'aime beaucoup :
Moonhead, d'abord, qui est anglais semble-t-il, et dont les photos sont souvent extrêmement drôles. Du saugrenu griffu au quotidien. Allez donc voir ce qu'il fait d'un banal équipement de plage...
Au passage, un fondant portrait de joueur de banjo et un ironique portrait d'un financier en déroute.
Chez Kivera, c'est une atmosphère (Est-ce que j'ai une gueule d'atm...?) très différente, un oeil pointu, acéré et une façon magnifique d'observer les corps qui parlent. De la tendresse sous-jacente, en cactus, piquants dehors et fleurs dedans. Et du turquoise.

Bon voyage!

7.10.08

Contrôle Biniou

Boomp3.com
Aie aie aie!
Chronique Blonde (une merveille, on vous le dit!)est en train de m'envoyer plein de monde, sous prétexte que ce blog sentirait la mer.
Mais si je regarde mes derniers posts, je suis très en dessous du niveau d'iode requis pour un blog maritime et celtique!
Au premier contrôle biniou, je suis bonne comme un far aux pruneaux.
(Au fait, Pablo, si vraiment tu n'aimes pas les caramels au beurre salé, il reste encore la sardine concarnoise :-))
Donc , pour saluer les passants d'Outre-Atlantique, je vous laisse avec ces surfers d'eau froide, un Gilles Servat de derrière les flaques d'eau et l'adresse de Boutoucoat, la Bretagne en sabots fins.




Tudieu*, je repasserais bien la mare aux canards pour allez voir les voisins, moué...



*Ou bien, pour rester en ph(r)ase avec Chronique, gast, vertuchou, cornegidouille, bordel-à- queue-charrette-à-bras...

5.10.08

Le bon indicateur

Au fond, bien des perceptions ne sont qu'une question d'indicateurs. Ceux qu'on se choisit, pour d'incidentes raisons, ceux auxquels on croit dur comme fer, qui sont la colonne vertébrale de notre vivant, ceux qui nous aveuglent transitoirement ou pour toujours, ceux que l'on brandit pour dessiller les yeux des autres, ceux qui vous reviennent en pleine figure.
Nos sociétés ne nous font pas violence au même endroit. Celui-là qui voit dans son amérique à lui, l'Eldorado où il a pu créer son entreprise en quelques coups de crayon, ne voit pas le vieillard qui travaille hors d'âge pour ne pas être jeté à la rue, le malade qui s'éteint sans soins, ni le retournement de la violence faite à l'humain dans une autre violence.
Les petites anglaises, si nombreuses à porter des enfants avant quatorze ans, m'ont toujours hurlé la limite d'un système qui avait déserté l'école publique, attaqué la sécurité du travail au profit de miettes multiples et précaires et fait, de l'allocation maternité la seule estampille sociale dont pouvaient rêver ces jeunes filles. Je sais encore le chiffres des études épidémiologiques et je n'ai rien su du cours des actions à la City.

Et ce couple croit n'avoir plus rien à se dire, parce qu'il ne sait plus que le décharger en points d'honneur raidis, en réponse de berger blessé à bergère haineuse. Et devant moi, entre eux, navigant d'eux à moi, avec toute l'affabilité de ses dix-huit mois, parfois interrogatif, souriant et occupé, un tout petit garçon qui me semble un excellent indicateur qu'ils sont loin, très loin de ne plus rien avoir à se dire.

Et les adolescents qui vous démontent avec une vitalité sardonique, tout ce que vous croyez avoir mis sur pied d'un tant soit peu prédictif, vous laissant partagé entre l'exaspération et le soulagement.


Alors cet indicateur là, que dois-je en penser? Plus qu'un autre, il est vacillant, mobile, irrésolu . Je ne pourrais jamais m'y fier totalement. C'est un indicateur flottant, qui se mesure moins à sa permanence qu'à sa résurgence obstinée. Il ne se mesure ni au nombre des plis, ni à leur forme. Il est inutile de savoir qui a pris la photo et qui a refait le lit, si ce fut court ou long, plein de langueur ou suffocant. Il est peu significatif de s'interroger sur ce qui fut dérobé à la routine, aux mauvais augures, à la fatigue.
Non, vraiment, cet indicateur n'en n'est pas un, c'est pur hasard si je le retrouve toujours sur mon chemin, incongru, narquois, tenace.
Ce lit froissé, c'est le sourire en coin d'une vie en diagonale. J'y dors parfois seule, voluptueusement barrée d'est en ouest, rythmiquement bordée du parfum étranger et si familier, enclos dans les plis.



La photo est de Michel Clair et le jeu du dyptique d'Akynou a servi de prétexte à ce billet. Qui donc est pour l'instant un monoptyque, tant que je n'ai pas trouvé de photo pour illustrer le texte proposé.

4.10.08

Recherche 100 000 signatures, blogueurs bienvenus.

La Fédération des Maladies Orphelines lance un appel pour la prolongation du Plan de lutte contre les maladies rares. Celui-ci se termine en 2008 et vous vous doutez bien que le désengagement de l'Etat serait une catastrophe pour les parents et les professionnels concernés.
Collecter des données, comprendre l'impact sur la vie quotidienne, surveiller l'évolution, cibler des programmes de recherches, tout ceci demande d'autant plus de temps que les cas sont rares et parfois difficiles à diagnostiquer.

La FMO parle d'invisibilité meurtrière et je crois que ce n'est pas exagéré.
Rien n'est plus facile à ignorer que ce qu'on ne se donne pas les moyens de voir.

Pour signer l'appel, cliquer ICI.

2.10.08

Cher Monsieur Pierre B.

J'ai le regret de vous annoncer que l'Etat lui-même comporte en son sein des salariés non chrétiens.
Pire, des salariés sans aucune espèce de religion et qui vomissent littéralement vos médiocres comptabilités discriminatoires et profondément inutiles.

La question essentielle est plutôt :
Madame la Ministre de l'Intérieur, avez-vous, dans vos rang des fonctionnaires dénués de tout respect de la démocratie, qui abusent de leur pouvoir étriqué au point de tenter des démarches illégales?


Quant à Monsieur Leroy, je lui conseille de toute urgence de s'abonner au flux RSS de La voix des Rroms. S'il lui plaît de comparer les gitans aux déchets nucléaires, au moins qu'il ait le sinistre courage d'aller leur dire en face.
La dignité, en politique, c'est comme les usines de traitement des métaux lourds : on est bien d'accord pour qu'il y en ait, mais on préfère que ce soit le voisin qui s'y astreigne.

Bon, j'avais des choses plus gaies à vous raconter, mais là, ma lecture en survol des titres m'est légèrement restée en travers de la gorge.

30.9.08

De la nécessité de la décroissance :




Un interrupteur bizarroïde genre EDF.

Sept tubes en plastique contenant divers substances. Légales. Par contre cinq seulement affichent de façon exacte ce qu'ils renferment. A savoir un gel antifourmis, un baume pour les lèvres, un nettoyant pour semelle de fer à repasser (?), un antalgique et un concentré de plantes-tout juste si le pharmacien n'est pas tombé dedans-qui prétend avec arrogance empêcher un homme de ronfler. Les Tubes 6 et 7 contiennent apparemment des graines de basilic et des graines de cléomes, mais une surprise est toujours possible après germination.

24 mètres de fil nylon, dont 12 mètres entortillés autour d'un chouchou violet, d'un cordonnet doré suspendant un dauphin d'ivoire végétal blanc et d'une fève en forme d'âne.
Un biberon pour chaton, séparé de sa tétine.

La tétine.

Un prospectus orange de la Maison L. visant à allécher tout à la fois l'amateur de pizzas et la maîtresse de maison surmenée.

21 espèces d'objets à écrire, depuis le bic jusqu'au crayon de couleur, en passant par le fluo, le stylo chic et -merveille-une mine de plomb au toucher sensuel. Pour un peu, je me remettrai presque à essayer de dessiner.*

4 bouchons plastiques, inidentifiés, mais curieusement tous verts.

Un tournevis cruciforme.

Une boule de plastique blanc. Peut-être du jeu Abalone?

Cinq cartouches de gaz pour siphon. J'ai l'impression qu'elles toutes sont vides. Un maniaque vit ici, c'est sûr.

Deux jetons carrés et pastel donnant droit à un tour de manège. Le manège est joli, la demoiselle a le pompon généreux envers les petits et les timides. Mais ma fille dernière a grandi.

trois autres chouchous, dont un définitivement irrécupérable. Non, même Emaus ne peut plus rien.

Un podomètre donné par un labo, avant qu'il ne s'aperçoive que de toute façon, je ne prescris jamais rien, à part des bilans.

Un thermomètre électronique, faux et moche. Le jeter et observer le cul des goélands.

Un petit thermomètre à mercure genre thermomètre à frigo.

Un double collier pour tube de cuivre.

Un cornet pour otoscope.

Un rouleau de scotch.

Un bout de plastique noir. Des hauts cris poussés par l'un des habitants alors que j'allais diriger cet objet vers la poubelle, il ressort que pas du tout, c'est un support pour phare de vélo, juste un peu cassé mais parfaitement utilisable. Perd rien pour attendre.

Un bib test. Ça sert à vérifier l'état de ses pneus. Insérer dans la rainure. Si le bonhomme mich*lin a pied, changer d'urgence. A ce stade, le génie humain m'impressionne.

Un téléphone.

Une calculette.

Un copieur de carte sim.

La dépouille d'un chéquier.

Trois cylindres métalliques, 5 mm de diamètre, servant à bloquer une étagère suedoise. Quatre aurait été mieux. Pronostic réservé, mis en attente.


Une pièce de 2 francs de 1941. Peut servir.

Une boite d'allumette du casin-o de Quiberon. Pas moi, je le jure.

Une petite paille dans un bout de plastique, devant initialement adhérer à une brique de jus de fruit. Je suis écologiquement morte de honte. Aurait dû revendiquer les allumettes du casino.

Un bouchon de liège, six piles, un échantillon de parfum, un bateau en papier, vert aussi, tiens, une télécommande qui télécommande je sais pas quoi, un protège carte d'APN, une pince à bijou, des perles de pâtes fimo, un dé, quatre barrettes.

un ruban auto-vulcanisant.

Une agrafeuse.

Une mignonne petite tortue.

Trois cartes de visites, quatre cartes de fidélité inutilisées, une carte à jouer. Pas de carte d'infidélité.



J'ai rangé un des deux tiroirs du buffet.
J'ai mangé les bonbons à la menthe.


Le raton laveur c'est l'objet en photo. Celui qui trouve à quoi ça me sert gagne une palourde directement livrée par char à boeufs. Ou des caramels.

* me remettre au dessin. Mmmmh. Un coup d'oeil sur le tiroir à dessin. Laisser tomber l'idée. Pis d'abord, faudrait ranger. Dommage pour les mines de plomb.

27.9.08

Primum non nocere

Un monsieur est passé en justice pour avoir laissé, une fois, son môme de 5 ans, pendant 45 minutes dans une aire de jeu close et surveillée, avec un portable. Il est accusé d'avoir compromis gravement la santé et la sécurité de son enfant.

Précisons tout de suite que ce jeune homme est probablement un grand couillon. Oui, il avait le droit de déranger son lardon de cinq ans de son jeu et de lui signifier qu'il n'avait pas le choix.
Parce que l'autre solution qui consistait à prévenir son chef qu'il avait son trousse-pet sur les bras, ça, c'est bien sûr du domaine de l'impossible.
Des générations entières ont fermé furtivement des portes nocturnes sur des nichées qui se réveilleraient seules, ont jeté un oeil sur la pendule de l'atelier en espérant que leurs gamins à la clé ne traineraient pas en chemin, des floppées de nourrissons ont vécu leurs premiers jours dans les arrières-boutiques, le biberon calé dans le bec.
Je me souviens de mes nuits de garde après la mort de C., les rares fois où je n'avais pas de solution pour garder ma bébé, ma terreur des appels nocturnes et ce téléphone que je posais à coté du berceau, pour que l'oreille compatissante de l'infirmière de nuit reste en veille pendant que je m'occupais du patient.
Alors, bien sûr, moi, j'aurais pris mon morveux sous le bras, content ou pas content, parce qu'un portable, c'est un peu court comme nounou. Mais c'est parce que je suis une vieille mère acariâtre qui supporte assez bien la frustration de sa descendance.

Mais quand même.
Si on considère le motif de l'accusation, est-ce qu'il fallait judiciariser à ce point?
M'est avis que l'enfant a très bien pu se sentir parfaitement en sécurité avec la promesse de son papa. Si l'absence ne dure pas trop longtemps, la parole des adultes fait sanctuaire de façon assez efficace.
Par contre avoir un père en garde à vue 48H par des adultes qui vous disent haut et fort qu'il est dangereux, ça oui, c'est traumatisant de façon à peu près garantie.
J'appelle ça l' effet Kenneth Starr. Rappelez-vous : pour fustiger l'immoralité de Clinton, ce procureur fit un rapport tellement détaillé de ses faits et gestes qu'il constitua un magnifique support d'onanisme pour tout un tas de jeunes gens.
J'ai très fort le sentiment que cet enfant se souviendra plus durablement et plus lourdement du procès fait à son père que de ses 3/4 d'heure au jardin du Luxembourg..

Le père a écopé de trois mois de sursis. Il me paraît à peu près certain qu'il ne recommencera pas. Une bonne remontée de bretelles dans le cabinet d'un juge aurait fait tout aussi bien l'affaire.

Maintenant, faisons ensemble un rêve. Un homme se lève dans un jardin public et lance une annonce à voix haute :
"Excusez-moi : je viens d'être appelé pour un travail urgent qui ne devrait pas durer. J'ai le choix entre interrompre mon enfant qui joue ou faire appel à la bonne volonté de ceux qui savent qu'il vont rester encore un moment ici. Acceptez-vous de veiller quelque temps sur un enfant qui n'est pas le vôtre?"

Des fois, le degré de civilisation auquel nous sommes parvenus m'effraye quelque peu.

25.9.08

Rechute


J'ai rechuté. Je suis relapse.
Je pensais cette histoire terminée pour moi, j'étais quasiment sûre que mon cerveau avait fini par se déconditionner. Quand même, le sevrage se comptait en année et j'en était contente.
Plus de crise de manque le dimanche soir, quand on a brûlé toutes ses cartouches, plus de regard envieux vers le voisin, plus de tentation d'aller taxer.
Une grande paix lorsque le sujet était abordé, le sentiment d'être ailleurs, au delà...
A quoi cela a tenu? Une période plus solitaire, des soirées un peu longue? La rentrée et ses quelques tensions?
Curieusement, c'est sans doute à ma fille aînée que je dois cette rechute, et c'est peut-être un retour de boomerang, car je suis en partie responsable de sa propre dépendance.
Dans son déménagement, elle a laissé, ne pouvant l'emmener, une bibliothèque.
Vide.
Insupportablement.
Et j'ai craqué. J'ai rouvert un carton, rempli un rayonnage et je me suis remise à lire.
Trois ans, merde.

DANS LE CARTON POLARS DIVERS

Il y avait Donald Henderson Clarke et Un nommé Louis Beretti
avec Alias Tire-au-But, Louis Beretti a longtemps été mon préféré. Je le reprend avec une infinie nostalgie, parce qu'il me rappelle un temps révolu.
Non, n'allez pas croire que je regrette la Prohibition! Je ne suis quand même pas si vieille. Ce n'est pas ce que décrit le livre, qui me ramène en arrière avec douceur. C'est de l'avoir lu en un temps qui me paraissait sans effroi.
Dans le milieu des années 70, nous n'avions pas le syndrome du monde méchant. Les crimes que l'on nous montrait à la télé était ceux de rois maudits et personne à ma connaissance n'était entré dans un lycée pour y vider un chargeur.
C'est donc l'esprit parfaitement serein que j'ai pu découvrir le monde de Louis qui jouait à mettre le feu au chapeau des chinois qui allaient jouer au fan-tan.
Sûr, Louis est un dur, qui découvre le sexe et l'opium le même jour, du coté de ses quinze ans, le jour, tiens, où son ami Big Italy tua son premier homme sur un toit de Chinatown.
C'est un macho aussi, qui peut se laisser surprendre en train de parler à une femme et l'écouter tant que ce n'est pas la sienne, qui veille sur la vertu de ses soeurs, qui achète à sa mère une maison pourvue d'un confort dont elle ne profitera pas, et dont les phalanges connaitront une lente migration vers le poignet, jusqu'au jour où il sera enfin assez puissant dans le trafic d'alcool pour arrêter de cogner.
Pourquoi diable me reste-t-il si sympathique?
Sans doute parce qu'Henderson Clarke relate une réalité loin d'être rose, mais sans vouloir en rajouter, sans vouloir à tout prix nous tirer un frisson de répulsion.
Il y a de la loyauté dans Louis, autant qu'il y en a dans son auteur. C'est un bon fils, un bootlegger consciencieux, un compagnon solide.
Peut-être parce que c'est avant tout un migrant, et qu'à l'instar de mon aïeul, la respectabilité est un luxe qui prend souvent quelques générations. Bien des petits capitalistes de banlieue, qui savent au berceau que l'essentiel est de prendre et de vendre le plus vite possible, sont, sans s'en douter, sur le chemin d'une honorabilité qui ne leur sera reconnue que plus tard.