25.2.07

with a little help from my friends

En lisant le blog de Kozlika, j'apprends qu'un professeur de math de ZEP a fermé son blog à la suite d'une procédure disciplinaire engagé par le chef d'établissement. Bien entendu, cela évoque tout à fait le précédent Garfield, sans compter l'inspecteur du travail Bereno, et le policier Thomas.
Là, j'éprouve une légère culpabilité.
Non pas tant parce que je découvre après coup ces blogs: après tout, les découvertes de proche en proche sont faites pour être aléatoires, et il n'y aurait aucun intérêt à suivre tous les mêmes balises, html ou pas.

Non, ma culpabilité est d'un autre ordre.

En fait, je tiens probablement l'un des très rares, sinon le seul blog de médecin de l'Education Nationale ( qui est bien souffrante, tout le monde le sait) et depuis un an, je constate que je n'ai rien fait pour le faire interdire. Et ce, bien que je l'eût ouvert en pensant y parler aussi de mon métier.
En dehors de ma propension naturelle à la flânerie, à l'esquive de toute photo officielle, aux regards toujours en coin et au plaisir pur des mots, je m 'accorderai d'autres excuses : les histoires que je traite d'un peu près sont nécessairement assez catastrophiques, et si peu me chaut qu'un menu potentat se reconnaisse dans mes écrits, qu'un de mes jeunes patients s'y voit nécessairement réduit me touche plus sévèrement. Donc très peu de billets en parlent, au point que je crois que c'est la première fois que je nomme en toutes lettres ce qui justifie mon salaire.

Mais quand même, en observant de si près mon devoir de réserve, est-ce que je ne commet pas un autre genre d'erreur?

Je prive par exemple ces messieurs d'une occasion de faire acte d'autorité sur un gibier rare. (je rappelle pour mémoire qu'il existe 1300 titulaires pour 14 millions d'élèves.)
Or faire acte d'autorité est bien le dernier plaisir qu'il vous reste quand on ne fait pas autorité.
Par ailleurs, une fermeture jetterai un coup de projecteur sur cette profession, ce qui serait bien utile aux candidats de tout poil. Car pour modeste qu'elle soit, ma profession constitue un fantastique observatoire du voeu pieu politique et du tic compassionnel.
Si! si!, je vous assure! Il en est de la santé scolaire ce qu'il en est des vieilles actrices de théâtre. A certaines échéances, on les sort du placard, on s'ébaubit sur leur fantastique talent, on regrette (en choeur) de les voir si peu reconnues , et on jure que promis craché, on les a découvertes pour de bon cette fois-ci, et que, cornegidouille, Mère Ubu, on ne les laissera pas retomber dans l'oubli. Un an après, on baîlle, tiens, l'est pas morte? Doit pas valoir beaucoup mieux...

Je vais donc tâcher de sortir de ma flemme, vous raconter un peu plus souvent pourquoi, malgré pas mal de vicissitudes, je continue à trouver nécessaire de coincer le pied dans la porte, pourquoi je trouve que la séquelle scolaire de la maladie est trop souvent vécue avec un fatalisme antique, pourquoi le problème ce n'est pas d'accentuer le dépistage, mais de donner des moyens de prise en charge.

Et puis je vous raconterai la petite trisomique qui voulait aller voir le grand rassemblement de montgolfières, parce que c'était des gens comme elle.

Bon, les gens j'ai besoin de vous. Va falloir tâcher moyen de me faire fermer ce blog au plus vite.


PS: à vous de trouver lequel des candidats, outre la départementalisation, prône de : Recentrer la médecine scolaire sur la détection et la prévention de certaines pathologies ou certaines situations aujourd'hui mal prises en charge (violences familiales ou sexistes ; troubles du comportement...).
Je me ferais alors un plaisir de vous expliquer en long et en large comment ce genre de posture me pue au nez.

24.2.07

Un peu de générosité en ce bas monde

L'on apprendra, à cette adresse parfaitement informée, que l'Etat même en période de restriction budgétaire, peut être compréhensif.
Une rallonge de 18%, ( substantielle, à l'aune d'un coup de la vie augmenté, lui, de 10%), aux FRAIS DE CAMPAGNE, signée en bonne deuxième place par Le Ministre de l'Intérieur lui-même, peut effectivement redonner le sourire à certains candidats qui auraient déjà pas mal dépensé, par exemple en frais de communication auprès des internautes.

Notamment...ah zut, comment s'appelle-t-il déjà? Son nom m'échappe... Espérons que je saurais m'en souvenir dans l'isoloir.

23.2.07

Du vent ce soir, chez moi.


A ce niveau de Beaufort, mon père n'aurait pas manqué de citer cette paysanne, peut-être moins affolée qu'il n'y paraissait :
"heu là, il fait un vent à décrocher la queue de tous les ânes, et mon pauv'mari qu'est dehors!"

20.2.07

1963: titre de séjour.


A ce stade là du jeu de ricochets, j'ai bien entendu envie de me dérober.
Anoter cette date, comme Louis XVI le fit du 14 juillet 1789 : "aujourd'hui, rien".
Ou bien anticiper ce qui fut ma première image télévisuelle, et dire "un trois milliardième de pas pour l'humanité, et depuis, qu'est-ce que je rame parfois."
Comme tout le monde ici, je suis née. Comme tout un chacun je gagne à être connue, mais pas trop. Je suis née, et le nombre de gens à qui cela importe est parfaitement ridicule en regard de ceux qui s'en foutent jusqu'au vertige.
De cette année qui vit la disparition de Jean XXIII, de Kennedy, de Piaf et de Cocteau, ma naissance et celle de Lolo Ferrari suffisent-elles à combler les vides ainsi laissés?
Pourtant je suis née, et depuis le résultat occupe une grande partie de mon temps, et un peu celui de quelques autres . J'ai sans doute été conçue de façon aléatoire, et je suis devenue plein d'autres choses par inadvertance, mais naître, non, cela j'ai dû le faire en m'y consacrant entièrement.
Dans ces histoires de naissance, il y a, en général, au moins deux personnes parfaitement concentrées sur ce qu'elles sont en train de faire.
Plus tard, au milieu de déchirements tout à la fois imprévisibles et curieusement répétitifs, ma mère s'accusa à plusieurs reprises de ne pas avoir été une bonne mère pour le nourrisson que j'étais, le troisième en trois ans, nourrisson tranquille et peu caressé. Est-ce vrai? Ou bien, comme je l'ai souvent pensé, était-ce une dérobade devant l'ici et maintenant de la violence maternelle?
Si j'en crois ma propre expérience de la chose, la relative bonne humeur que je mis à en faire naître trois, avec ni plus de complications qu'une mère chatte, ni moins de poids qu'une baleine, la sérénité avec laquelle je donnais le sein, tant au commissariat, qu'à la table du conseil municipal, je peux, là aussi, me livrer à une supposition : elle ne devait pas être si mauvaise mère qu'elle a bien voulu le dire.
Car ces choses-là, qui ne font nuls souvenirs, font mémoire au corps, et j'ai bien de quoi dire, somme toute, merci.
"the rough places will be made plains and the crooked places will be made straight"
On peut toujours rêver.


NB: je le rappelle, de nombreux autres ricochets, de toutes provenances, sont lisibles ici

19.2.07

la part réservataire.


Pour parodier Duras, y-a-t-il un voyage qui puisse tenir lieu de voyage, une rencontre qui tienne lieu de rencontre?
Je suis partie, je partirai toujours. Près, loin, cela n'a pas d'importance. J'ignore presque toujours ce qui me met en mouvement. Ce n'est ni la curiosité, ni le désir d'exotisme. Pourtant comme tout le monde, il m'arrive de rêver de soleil immobile, de siestes longues, du plomb fondu entre les omoplates, oui, oui, imaginez ce que vous voulez.
Mais vous ne m'avez pas vue descendre une autre rue Sainte Catherine, fouettée de neige, les joues mordues, légère, presque clandestine dans cette nuit qui tombe si tôt. Vous ne m'avez pas vue, la tête en arrière devant un rêve enfantin: voir- non pas voir : ENTENDRE les glaces sur le fleuve.

Non, vous ne m'auriez pas vue, je ne me serais pas donnée à voir. J'ai généralement le voyage pudique et dérobé, dans les interstices, en passant. Je suis polie avec les monuments, et souvent spectatrice ravie des arrières-cours. Je croise vos chats avec bonheur, et j'aime goûter ce qui vous nourrit. Je regarde les bus que vous prenez, les livres que vous lisez. J'aime moins vos grands hommes que les strates patientes de la vie des vôtres.

Des gens? Oui, il y eut des gens, mais ils ne m'appartiennent pas. Je les ai effleurés, ils m'ont touchée, je n'en dirais rien de plus, la bribe ne se porte bien que dans un vent flou.

Je vous aime toujours.

18.2.07

je vous aime toujours.


Après une petite semaine dans l'improbable de l'ailleurs, back to reality.

8.2.07

Kan an avel

Ce blog part en vacance dans une certaine direction, et moi dans une autre. Je le retrouverai peut-être en route avant mon retour à la maison, mais cela n'est pas sûr.
Pendant cette semaine, portez-vous bien, et si certains veulent bien me porter un peu dans un coin de leur tête, j'y serais, je crois, fort bien.

7.2.07

du bromure dans l'eau de la ville, et qu'on en parle plus.

Le comité national d'éthique a clairement renvoyé l'inspiration du texte sur la prévention de la délinquance là d'où elle n'aurait jamais dû sortir. Dans le bourbier des vieille tentations de la maîtrise hygiéniste.
La fameuse étude de l'Inserm qui avait motivé l'appel du collectif "pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans" est clairement mise en cause tant sur ses postulats initiaux que les modalités de l'étude elle-même. Du trouble du comportement au trouble à l'ordre public, c'était une étude d'une troublante opportunité.
J'aime bien cette phrase du comité:
"Nous redisons notre opposition à une médecine qui serait utilisée pour protéger la société davantage que les personnes."»

Et bien qu'incroyante, je vous joint, pour faire bonne mesure, des extraits de la prière attribuée au médecin Maimonide, dont j'aime bien, là, l'inspiration.

"Mon Dieu, remplis mon âme d'amour pour l'Art et pour toutes les créatures. N'admets pas que la soif du gain et la recherche de la gloire m'influencent dans l'exercice de mon Art, car les ennemis de la vérité et de l'amour des hommes pourraient facilement m'abuser et m'éloigner du noble devoir de faire du bien à tes enfants. Soutiens la force de mon cœur pour qu'il soit toujours prêt à servir le pauvre et le riche, l'ami et l'ennemi, le bon et le mauvais.
Fais que je ne voie que l'homme dans celui qui souffre. (...)
Éloigne de leur lit les charlatans, l'armée des parents aux mille conseils, et les gardes qui savent toujours tout: car c'est une engeance dangereuse qui, par vanité, fait échouer les meilleures intentions
Prête-moi, mon Dieu, l'indulgence et la patience auprès des malades entêtés et grossiers.(...)
Fais que je sois modéré en tout, mais insatiable dans mon amour de la science. Éloigne de moi l'idée que je peux tout. Donne-moi la force, la volonté et l'occasion d'élargir de plus en plus mes connaissances. Je peux aujourd'hui découvrir dans mon savoir des choses que je ne soupçonnais pas hier."


J'sais pas, cela me parle plus que la recherche de l'héritabilité du trouble du comportement.

C'est peut-être la couleur?

5.2.07

Et je m'éloignerai m'illuminant au milieu d'ombres


Bien sûr, la foule. Cette chose sans couleur à pieds multiples, qui s'écoule ininterrompue, sans regard, sans autre odeur qu'un collectif fond de fatigue et de surchauffe, la foule que j'ai fui, qui érode si vite mes patiences, qui me bannit des endroits "faits pour", la culture , le sport, le loisir, la ration de soleil de l'été...
Bien sûr la foule. Mais quand même, ce bouquetin foutraque et discret qui teste son matériel de montagne dans son salon et ne dit ses chagrins qu'à mi-mots, cette fille du bord de mer qui vous pond des pastiches de Fréhel comme en s'en moquant et incise la douleur avec une sûre passion du verbe, cet ours perdu en ville qui plante son museau en l'air pour appeler le lac et les bois, cette semeuse de petits cailloux et d'amarres secourable, cette dame-là qui doit être enseignante si j'en juge son paquet de copies? Ah non, tiens, ce sont des recettes de confitures poétiques, et le dessin de cet enfant dont elle tente de faire dévier le destin programmé, et puis la dame qui enfourche un vélo retrouvé pour distribuer ses miettes de courage, aux proches comme aux lointains, le pêcheur d'images, celui là même qui se plante là d'un seul coup, laissant la foule continuer sans lui, parce qu'il a vu dans un coin ce qui avait échappé à tout le monde, et qu'il a déjà dans la tête l'autre image avec il va frotter celle-ci parce que, quand on s'y prend bien, ça fait des étincelles, et cette jeune fille toujours un peu perdue dans le métro, qui s'en va toute seule à Vanuatu, parce que les langues, c'est comme les baleines, ça doit pas s'éteindre.
Je ne sais pas si vous verrez cette dame qui, dans quelque chose comme ça, verra le fragment qui fait sens, ni le délicat poète-photographe, ces deux là effleurent pour mieux voir, et l'on ne voit qu'après-coup la trace de leur passage. Pas sûr non plus, que l'on repère sous le costume sage, le loup métaphysique, et de la blonde, l'oeil vif et sagace.
Mais ceux-là et quelques autres me réconcilient avec le flot.
Hep! Diogène! prend ta lanterne et un taxi, et viens voir dans ces parages...


(le titre cite Apollinaire)

3.2.07

1962 : frères, la ligne de partage des os


En 1962, Messieurs Crick, Watson et Wilkins reçurent le Prix Nobel pour leur travaux sur la structure de l'ADN.
Ce fut cette année là également que naquit le deuxième brin de cet ensemble que je nommais, de façon auto centrée : mes frères. Sous- ensemble quasi -indiscernable, d'un noyau appelé "les enfants", dont émergeait à intervalle régulier, un quota suffisant de genoux écorchés, de bouches à nourrir, d'oreilles à laver, pour qu'on nous jugeât en bonne santé physique.
Si les petits cailloux qui ricochent en direction de mes parents interrogent le fil de la transmission, celui-là questionne le partage. Et pose, de façon très nette, le double sens de ce mot, qui parle de ce qu'on fait circuler entre nous, de ce qui appartient tout entier à tous et à chacun, mais aussi de ce qui tranche, isole, et distribue en fragments inconciliables. Sans nul doute, la langue que nous partageons est riche de ces doubles sens, de ces appariements en miroir, distincts et indissociables.
Nous eûmes cela, le trésor sans fond des histoires inventées à trois, des chatons solennellement promenés en landau, du bruit de la pluie sur la toile de tente, la barre du milieu, bien sûr, et d'improbables pulls tricotés main par une grand mère aveugle, tout ce qui tenait chaud à chacun sans léser l'autre.
Pourtant, les places n'étaient pas interchangeables. Dans chaque famille, dans chaque clan, se créent des territoires de prédilections, qu'on se les choisisse ou qu'on vous les impose. Notre adolescence fit éclater le magma avec d'autant plus de violence qu'à la nécessaire négociation intime de notre âge s'ajouta l'effondrement du couple parental. Les lignes de partage dessinèrent la géographie douloureuse de nos conflits de loyauté. Dans le retournement haineux du divorce, Médée nous laissa la vie sauve, mais ce ne fut pas sans contrepartie. Sommés insidieusement de prendre partie, incapables d'être infidèle à l'une des moitié de notre génome, nous lâchâmes notre complicité pour réorganiser solitairement nos débris.

Adultes, nous savons encore qu'il ne faut jamais parler sèchement à un numide et nous rions encore à faire parrrrrrrler petit pistolet trrrrrrrrrente- six coups. Notre fond commun de vieilles plaisanteries, la certitude que chacun à notre manière, nous avons tous tenté de comprendre quelque chose au monde qui nous entoure, notre rapport à l'enfance, notre (trop souvent muette) sensibilité à ce qui affecte l'autre, continuent de jeter, par endroit, des ponts sur nos tranchées de repli.
Mon père fit deux autres enfants, avec lesquels tout sera différent, et bien sûr, je me suis crée d'autres frères.
Dans mes aînés, outre ce que la vie a fait d'eux, je contemple des reflets inédits de mes parents, dont certains m'avaient- et c'est le cas de le dire- complètement échappé. Mais malgré cette inaltérable familiarité, je garde l'étrange sensation qu'il me sera désormais, et pour toujours, plus facile de leur donner ou d'en recevoir un rein qu'un avis.

2.2.07

c'est toujours ça de pris, mais à quel prix?.


"Les enfants sont ainsi: ils commandent au monde par l'énergie d'un voeu desespéré. Et quelque fois, dans sa folie, le monde leur obéit."*

Suzylène est de retour, grâce à la mobilisation de RESF, et des lycéens de Colombe.
J'en suis fort heureuse. Plus que de lire dans mon cause-toujours local, la construction à marche forcé d'un centre de rétention.
J'aimerai qu'on me fasse un jour, un bilan strictement comptable de ce que coûte l'accueil de Suzylène et de ses pairs, et ce que coûte l'entretien de X fonctionnaires , pour traquer, trouver, surveiller, expulser... et parfois ramener des gens qui pourraient de leur côté utiliser leur énergie à autre chose qu'à se planquer.
En thérapeutique, on a parfois un genre de surprise quand on a l'honnêteté de calculer les rapports coûts/bénéfices.



* La phrase vient d'une carte postale qu'on m'envoya à un moment critique. Si d'aucuns lui connaissent un auteur...

1.2.07

blog -out

Ce soir entre 19h55 et 20H, noir. Je serais en cours de langue. Vu la respectabilité des participants, j'ai bien peur qu'il ne m'arrive rien.
Et vous, vous avez fait quoi dans ces 5 mn?