30.11.07

futuriste.

C'est le thème de la semaine chez Lens Day.
May be this one?




Encore que je garde une certaine tendresse pour celui-ci, mon premier essai de bidouillage sur Fautau chop:

28.11.07

Encre ici, Ab Dick...


Dans mon curriculum vitae, entre le ramassage des framboises et une parfaitement usurpée mission d'audit de communication interne, figure la mention "conductrice offset".
C'est un fait : j'ai su conduire une offset avant une voiture.
Juste retour des choses, ce tendre mastodonte prénommé AB Dick 350, de la fac de médecine, m'a conduite bien plus loin que je ne l'aurais imaginé, et notamment devant un Monsieur Maire.
Je n'y pensais pas (menteuse!) lorsque, dans les locaux de l'association des étudiants où j'allais exercer mes talents deux ans durant, j'écoutais gravement le démiurge maculé d'encre assortie à ses sourcils me donner mon premier cours d'anatomie roto-calcographique.
Car, sous ses airs de brute noire et carrée, une offset est une diplomate jouant subtilement sur tout une série d'attraction-répulsion, l'eau et l'encre grasse se rejetant mutuellement, la première se consolant avec l'aluminium, tandis que la seconde est absorbée par le cuivre. Le tout à un train d'enfer, car l'offset joue à tournez-manège huit mille fois par heure.
J'ai encore en tête la symphonie nocturne de la cérémonie d'imprimerie. Je reconnaîtrais partout le doux sifflement de l'aspiration de la feuille de papier, le glissement le long des rouleaux, le bruit de baiser poisseux de l'encre et l'atterrissage sec, immédiatement calé de l'exemplaire imprimé.
Tiens. J'étais partie pour vous raconter des choses drôles, le condisciple penché d'un peu trop près, et dont la barbe se coinça dans les rouleaux, l'immonde pâte à papier dans le réservoir d'eau qui résulta de ma première expérience en solitaire, et mon appel affolé à trois heures du matin, le journal étudiant en cambodgien Khmer,dont un courant d'air malencontreux mélangea la pagination, et dont nous ne pûmes, faute de traducteur, retrouver ni l'ordre logique, ni le haut, ni le bas, et que nous imprimâmes dans une totale confusion.
J'étais partie pour cela, et j'arrive à une vraie nostalgie de l'odeur d'encre, de ces nuits alternant somnolence et fièvre, quand le bruit d'une feuille "montée dans les rouleaux" nous faisait dégringoler du tas de ramettes sur lequel nous tâchions de grappiller un peu de sommeil avant de reprendre la journée d'hôpital. (Ah, le regard torve du chirurgien sur la ligne bleu-noir de nos ongles qui transparaissait sous les doubles gants et le mal que nous avions à le convaincre que l'encre d'imprimerie était on ne peut plus inapte aux germes clandestins!)
Le démiurge noirci comme un Vulcain est toujours là, et s'il a vieilli, si les ongles sont devenus propres, son poil est toujours sombre.
L'offset, belle au blanchet dormant, est au fond du jardin. Il l'a rachetée à l'association, n'ayant pas eu le coeur de s'en séparer. Depuis, elle nous suit. J'ai bien sûr grommelé devant la difficulté de la transporter lors de notre déménagement. Mais c'est assez facilement que je me suis laissée attendrir.
Ce n'est pas fréquent, un homme qui garde une telle fidélité à un souvenir de jeunesse d'une demi-tonne.

27.11.07

Aujourd' hui : rien.

Des fois, je ne perçois ma propre tension que quand je l'efface, de ce mouvement d'épaule d'après la lutte. Boxeur sortant du ring, danseuse ou cireuse d'escalier, pareil, l'ai-je bien descendu?
Cette tension, je la connais bien, elle est moins liée à la dureté propre des situations individuelles qu'à la complexité des enjeux entrecroisés. Ménager chèvre, chou, et jusqu'au piquet et à la corde...
S'il m'arrive quotidiennement de rencontrer des enfants et des adolescents qui ne vont pas bien, c'est rare que je voie, comme aujourd'hui, une classe entière qui va mal. Petite classe d'une formation peu qualifiante, elle regroupe cette année, un extraordinaire concentré de souffrances diverses. Ce n'est plus une classe, c'est un jeu de tarot divinatoire, où chacun tient une place exemplaire.
H., sur le mode même pas mal, ment comme un arracheur de vote, boit, fume et vole, I., raide et fermé, fume, boit et cogne, J. se suicide un jour sur deux, se scarifie l'autre, fume et boit un peu moins qu'avant, depuis l'instauration du traitement, et pleure toujours autant. K est là épisodiquement, quand elle n'est pas occupée à couvrir son bébé de bisous voraces et à l'égarer ensuite chez qui en veut, et quand elle est là, dévore l'adulte de son enfantine avidité.
Ces quatre là, au hasard Baltazard, t'as tort Melchior, ont des pères perdus ou pendus, et leur mise en commun tient de l'expérimentation perverse : ils n'en peuvent plus de se chercher, de se trouver à belles dents, de s'éprouver jusqu'à la vivisection, entrainant des satellites moins souffrants, mais tout aussi vulnérables. Le groupe ne cesse d'exploser, de se fragmenter, les désertions durent une heure, ou trois jours, avortant tout projet, toute tentative scolaire.
Je ne sais pas par quel bout prendre cette tête de Méduse. Le seul morceau qui n'en morde pas immédiatement, c'est l'équipe enseignante effarée, au bord de l'arrêt collectif et plus qu'au bord des larmes.
Or il n'existe aucun ressort institutionnel pour ce genre de situation. Tout au plus puissé-je suggérer à l'équipe de prendre contact avec une équipe de psychiatrie de l'adolescent, au moins pour être un tant soit peu écoutée.
Que faire d'autre?
Redresser un peu les épaules, ma journée est finie.

26.11.07

j'aime, j'aime pas, c'est ben compliqué.


Je n'aime pas le poids des religions, mais j'aime la petite chapelle de XXXX dessinée à l'encre de Chine sur fond de ciel et de mer, flanquée de deux judicieuses petites vaches noires.
Je n'aime pas l'étouffoir de la dépendance, mais certaines chansons d'alcooliques m'émeuvent à me pendre. Si tu me payes un verre, je ne t'en voudrais pas de n'être rien du tout, je ne suis rien qui vaille*.
Je n'aime pas la foule, mais la ferveur, celle qui ne peut naître que de l'assemblée, m'atteint plus souvent que je ne le voudrais. Après des années de pratique prophylactique de l'ironie, je continue d'avoir la larme badaude, et des enthousiasmes de gobe-mouche.
Je n'aime plus la ville, et pourtant, je suis du regard la ligne d'un immeuble comme celle d'un bateau, et la friche industrielle est, comme la grève, une inépuisable source de trésors oblitérés.
Je n'aime pas la pêche à la baleine, mais les chansons qui en font foi, et le vieux bois d'une chaloupe usée me chavirent, haul away, old fellow away...


( c'est Reggiani qui chantait ça, et, pour une phrase pareille, je lui aurais bien payé une douzaine de verres).

25.11.07

Pour saluer Still


Still nous annonce avec cette très belle photo le décès de son père. Qu'il lui soit redit ici combien je l'aime et combien je pense à elle. Gens de coeur, si vous avez aimé ses photos, allez donc l'effleurer en ce temps noir et blanc et gris aussi...

24.11.07

comme une envie d'élégie



La fenêtre découpe un rectangle clair sur le lit.
Des petits nuages roses viennent de Saint Malo, gonflant leurs voiles pour se donner de l'importance.
Le goéland de huit heures un quart est passé depuis longtemps.
Samedi matin.

20.11.07

Aujourd'hui, grève entre drapeaux rouges



Et bistro après la manif.
Pff, de qui sont-ils les hommes de paille?

18.11.07

Fille indigne


Est-ce que je la connais?
Et qui, pourtant, pourrait m'être plus familière?
Le visage s'est soufflé jusqu'aux yeux, autrefois si grands, si bleus. La morgue n'est plus entière, elle s'est veinée, sans doute, de la pensée qu'un jour, la solitude pourrait être sans rémission.
J'écoute en moi comme une archéologie de sentiments autrefois tumultueux. Plus que la voix, habilement modulée, si souvent péremptoire, dont je n'écoute plus les provocations, plus que les traces pesantes et floues de l'alcool et du temps, ce sont les mains qui pourraient m'émouvoir. Elles y arrivent fugacement, la peau si douce, les longs doigts, le toucher offert, curieusement plus spontané que toute autre communication, ce contact sans aggrippement, quand tout le reste est si avidement soumis au besoin d'emprise.
Je me laisse émouvoir, parce qu'il n'est plus si douloureux d'accueillir la nostalgie de ce qui a manqué à être, parce que la marcotte a pris, finalement, dans un terreau ni proche ni lointain, un terreau partagé ailleurs. Je me laisse émouvoir et m'en vais, somme toute, puisque la seule façon de ne pas achever cet irrassasiable gâchis, est d'en garder par devers moi les fragments féconds.
Je m'en vais, escortant en moi seule, après tant de drames publics, la compassion blasphématoire que j'éprouve envers ma mère.

14.11.07

Breizhkou*


La lumière longue
Oblique sur la lande tannée
Je vais à Ouessant

(* Haïku breton, selon la magnifique néologisation de Traou)

13.11.07

Heuristique à la chandelle


Un homme, un jour, errait dans un désert, tourmenté par la soif et la faim. Au coeur de la nuit,à bout de force, il se mit à prier. Sa prière fut intense, à la mesure de sa détresse. Un souffle doux passa autour de lui, et la puissance inconnue déposa un petit tas près de lui. Au toucher, il reconnut des figues, mûres à point. Il en goûta une, et tous les jardins du Paradis lui descendirent dans la bouche. Moelleuses, parfumées, fondantes, elles calmaient tout à la fois la faim, la soif, la solitude et le froid.
Éperdu de reconnaissance, il pria à nouveau, remerciant pour ce don divin.
" Ah, pensa-t-il, quel dommage que mes yeux ne puissent se réjouir comme mon palais, quelle dommage que je ne puisse contempler de mes yeux, ces merveilles qui témoignent, Seigneur, de ton infinie bonté."
Aussitôt, surgie du néant, une chandelle allumée apparut.
Et l'homme put contempler les figues.
Elles étaient toutes, absolument toutes véreuses.
L'homme, alors, souffla la chandelle.
Et se remit à manger les figues.

Stupide aveuglement?
Sublime renoncement?
Conscience intime que rien, jamais n'est parfait?
Accomodante lâcheté?

Je n'ai jamais su décider.
Alors j'ai soufflé la chandelle sur la parabole.

12.11.07

kitsch-net


Chez Ah Oui, j'ai trouvé l'annonce de Tambouille qui organise aujourd'hui, un inventaire des objets biscornus, drôles, précieux, moches ou incongrus de vos cuisines.
Voilà les miens, catégorie aléatoire:


La tasse à moustaches, qui me vient de mon grand-père. J'attends encore le bel hidalgo qui viendra y boire un délicieux chocolat, sans salir l'ornement pileux de son aristocratique lèvre supérieure. (le problème, c'est les serviettes brodées que je n'ai pas. Croyez-vous qu'il accepterait un Salopin à la place?)


Le buveur de chocolat n'étant pas venu, un petit bonhomme tout rond est venu prendre le thé.



Cendrillon est venue chez moi. Sur le coup de minuit, elle a laissé sa pelle à gateau. Et j'ai pris 10 kilos.

Quant à celui-là, hummmm...


Me reste à vous présenter cette magnifique écumoire chinoise, à moins que ce ne soit une écumoise chinoire. C'est un magnifique sert-à-rien, qui met son point d'honneur à être totalement inutile. A ne pas confondre avec le Sert-à-tout, qui lui, peut parfois servir à quelque chose. Encore que rien n'est moins sûr.


Et chez vous? En tous (en)cas, ne vous privez pas de l'exposition virtuelle chez tambouille, elle est fort gouleyante.

11.11.07

avel y vélo

Trouvé chez Samantdi, un concours de vélophoto organisé par Jathénais et gilsoub.

Voili, voilà, vélo.



Et si vous voulez savoir pourquoi mon blog, y va mouru, c'est là.. Ne me dites pas que devrais avoir honte, je pense que c'est exactement pour ça que c'est bon.

9.11.07

du bleu, jusqu'à l'embellie


Encore un tableau volé sur le chantier de carénage... Décidément, j'ouvre sous la rubrique "la galerie de la cale", le catalogue de ces oeuvres éphémères.
La première est ici

8.11.07

haiku breton


L'oeil de la baleine
Regard croisé dans le port
La grève est finie

6.11.07

la gavotte du pantin ou "La raie publique nous appelle"

"Nous n'irons plus en mer
les chaluts sont levés
si vous voulez de la sole
Voyez donc l'Elysée"


Après le Petit Timonier, Le Petit Poissonnier?
C'est pour lui l'occasion ou jamais d'apprendre que le talent d'un patron pêcheur, c'est aussi de savoir composer un équipage où chacun sait ce qu'il doit faire.
Etre à la barre et au chalut en même temps, cela ne dure jamais longtemps.

5.11.07

un dossier épineux


Jardinière intermittente, tolérante à la mauvaise herbe, feignasse d'exception, espérant peut-être toujours secrètement qu'une chose aimée puisse se passer de soins, j'ai, j'ai toujours eu, dans mon jardin, au moins un roncier.
Par la force des choses, celui-ci est généralement situé aux confins, dans les zones les moins visibles, mais hélas aussi, les plus susceptibles de déclencher un conflit de voisinage.
Il faut, un jour, décider la radicalité.
Le roncier, tout d'abord, se toise.
Il s'évalue posément, en enfilant ses gants d'un air assuré.
On en coupe quelques unes des branches les plus folâtres, les imprudentes pousses de l'année, qui s'imaginent conquérir un territoire à elles seules, dès lors qu'elles se seront poussées du col, hors de la pelote d'origine. Les présomptueuses partiront les premières.
Parfois les seules de la journée, pour peu qu'une visite arrive ou que l'on me proposât imprudemment de prendre un re-café.
Mais comme les chiottes ou le cimetière, le roncier, un jour, fatalement, faut y aller.
Et plus seulement du bout des doigts. La chose s'affronte des mains, de la tête, du pied, et parfois de l'épaule. On rend perfidie pour sournoiserie, on profite de la force agrippante de l'adversaire pour engluer les drageons les plus faibles et tirer d'un coup sec, on déterre, hache, taille, on poursuit les racines jusque sous les murs.
R. le roncier se venge d'une souple détente, fouette au ras des yeux, infiltre ses épines kamikazes sous les gants, juste à l'extrémité sensible de la pulpe des doigts, et se cramponne à tout, ne cédant que sous la lame.
Quand le sécateur a trouvé et tranché l'ultime lien barbelé, il me semble que la masse entière cesse de se défendre, que sa vitalité funeste s'éteint d'un seul coup, ne laissant plus sous ma main qu'une botte embrouillée et sans hargne.
Et quand la fourche, sans effort, la soulève en direction de la brouette, j'ai le sentiment essentiel que j'ai extirpé bien autre chose qu'un souci végétal.

4.11.07

boucaille

Je n'aime pas le port en berne, je suis partagée sur la question de la pêche: protéger la ressource, qu'elle soit énergétique ou animale, protéger les familles qui en vivent, puisqu'il n'est pas juste qu'elles prennent de plein fouet, et avant nous, le résultat de nos gaspillages. Qu'il ne soit plus possible de pêcher comme il y a 20 ans, c'est évident, mais pourquoi, toujours, tirer l'échelle sous les pieds du matelot, et le regarder couler.
Petite consolation, l'exposition éphémère de la cale de carénage est toujours aussi belle:




et voici l'une des galeries:

1.11.07

Le loup, la pétition, moi et le petit lapin blanc

Mon cher Loup,
bien sûr que non, je ne vais pas supprimer ton commentaire en dessous de mon dernier billet.
Sans se connaître vraiment, je crois qu'on s'aime bien, et toi et moi avons passé l'âge de jouer aux bisounours. Je ne connais pas les raisons de ta colère, mais c'est bien de la colère, et non de la malveillance. Alors je le laisse là, ce commentaire rageur.
Mais j'y laisse aussi chacun de mes billets, bien sûr.
Et bien sûr, il y en aura d'autres du même ordre, pour tout un tas de raisons. Tu ne trouveras pas, même en farfouillant dans le tas, l'idée qu'une pétition change le monde, ou tient lieu pour toute soupe, d'action militante. Se désolidariser d'une mise devant le fait accompli, c'est juste, de façon infime, faire la différence entre une décision prise sans que personne ne moufte, et une décision prise malgré quelques ou beaucoup de protestations.

Quelque chose qui aurait à voir avec l'ultime offense qu'est le silence.

Sans que cela me coûte beaucoup plus que de savoir que je ne serai jamais fonctionnaire de première classe-la belle affaire! Mais penser que je ne serai pas tout à fait seule, à l'heure de la désobéissance, quand je refuserai de signaler aux maires, les enfants instables et les familles vulnérables, me met un peu de baume au coeur. Parce que, au train où vont les choses, ça va m'arriver tout droit sur le nez d'ici peu.
L'ennui, vois-tu, c'est que je n'ai plus la ressource d'imaginer que je vais poser des bombes sans imaginer tout le boulot après pour nettoyer, soigner les blessés, réconforter les familles et répondre aux journalistes.
Remarque que je suis prête à changer d'avis, mais sur d'autres arguments qu'imprécatoires.
Ce que tu ignores sans doute, mon cher Loup, c'est qu'une femme ne vit pas sans être des dizaines de fois confrontée, pour peu qu'elle ouvre un peu la bouche, à une multitudes d'avis masculins extrêmement condescendants, sur le mode "ma pauvre, t'as rien compris!Tu devrais plutôt faire çi, ou ça, poétesse plutôt que porte-pancarte, p*ute plutôt que médecin, otis plutôt que pfiffre etc..."
C'est donc avec beaucoup d'amitié, mais une très ancienne fatigue, cher Loup, que sur ce point très précis ( et le seul, hein les gens!) je t'emmerde.
Il continuera à y avoir ici, exactement ce que j'ai envie d'y mettre, et dans l'ordre que je veux.
On se fait déjà assez suer dans la vie à faire son petit lapin blanc - pas bouger, bonne bête- pour ne pas continuer ici.
Je t'embrasse.