13.6.10

bébés phoques


En ce moment, j'ai plein de bébés phoques.
De ceux qu'on pose sur la banquise, l'œil implorant et le poil mouillé devant les caméras et avec l'injonction immédiate et culpabilisatrice de "faire quelque chose!".
Docteur.

De résoudre le problème de ce jeune homme appareillé depuis des années, jamais signalé et dont on se dit, que peut-être, éventuellement il serait gêné pour entendre les bandes sonores aux épreuves orales de langue. Dans une salle déserte avec une seule personne. J'ai dit : "Ah? Et sept ans dans une classe plein d'adolescents bourrés d'hormones, il a entendu correctement?"


De celui qui terrorise tout le monde du haut de ses 8 ans manifestement psychotiques, qui est en attente de classe spécialisée et dont on me demande, faute de position claire du psychiatre et de l'inspection primaire de déclarer qu'il est "médicalement inapte à la scolarisation." Bon d'accord, mais du coup, comment vous allez pouvoir le scolariser dans sa classe spécialisé après? J'ai dit à l'Inspecteur que je pouvais faire un certificat comme quoi l'école de P. était "institutionnellement inapte à scolariser cet enfant." De toute façon, ça fait très longtemps qu'on est pas copains, lui et moi :-).

Celui qui vous demande un certificat d'aptitude pour aller en lycée agricole, parce que c'est le seul endroit qui l' a accepté et qui vous jure, les yeux en coquelicot, le nez en patate et la voix étouffée que non, absolument pas, il n'est pas sensible au rhube des foins. J'ai rien dit, j'ai tendu le paquet de mouchoir et levé un sourcil.

Celui qui a perdu sa maman et qu'on me supplie, à rebours d'une de mes rares règles intransigeantes (On voit un enfant de 6 ans avec l'adulte responsable, point barre.), d'accepter que la visite se déroule avec une grande sœur, parce que le père est en déplacement. Montez le son à 60 décibel et écoutez, sans frémir si vous le pouvez, la phrase proférée devant toute la classe : "PASSQUE C'EST PAS SA MERE QUI VA POUVOIR VENIR, HEIN!". Je suis héroïque, je n'ai pas répondu "il a un père, connasse, et une grande sœur qui a largement autre chose à faire de son chagrin que de jouer les mères de substitution".
J'ai eu le dit père longuement au téléphone, tout va aussi bien que cela peut, ils font face. Nous nous verrons en septembre, calmement. Dignement.


A vous, parce que vous êtes des potes, je vous dis : cette fin d'année, j'en ai marre.

10 commentaires:

Gilsoub a dit…

Courage, courage, c'est bientôt la fin d'année et eux ont grand besoin de gens comme toi, d'une oreille qui écoute, jauge et essaye dans la mesure de ses possibilités de bouger un peu la merde qui les étouffe...

samantdi a dit…

Pas mieux que Gilsoub : tiens bon la barre, matelot.

Je t'envoie des bises et des coquelicots de mon jardinvague dans lequel j'espère te voir gambader bientôt !

Franck a dit…

Des bises et pis un de bise et pis c'est tout. Le reste en direct, un peu plus tard :-)

Valérie de Haute Savoie a dit…

Oui un peu d'éloignement, pour reprendre des forces. Mais peut on vraiment s'absenter de ce métier qui demande tant ?

Yves a dit…

Il y a comme ça des jours où on a plus de sympathie pour les piliers de bar croisés ces jours derniers que pour ces piliers de l'Administration.

Eric a dit…

Même sans monter le son on avait bien entendu... Y'a des coups de pied au cul qui se perdent, des fois.
J'ai eu un joli captcha : oboarkha.
Ça fait plante exotique.

Tellinestory a dit…

@Gilsoub : ah non, ne me refile pas d'autres bébés phoques!
@ Samantdi : pis je prendrais plein de gros plans de coqelicots sur lesquels tu feras semblant de t'extasier ;-D
@ Franck : vivivivivivi!

@Valérie : dans l'année, pas trop. Mais oui, en vacances, j'oublie très bien.

@Yves et Eric : pour consoler, je viens de tailler une bavette avec deux modèles d'instits de rêve... drôles, vifs, patients. Pourvu que la Marâtre EDNAT ne nous les abîme pas!

les pistaches qui n'en pouvaient plus a dit…

pour rebondir sur Yves (boooooing) (pardon Yves) un p'tit apéro (avec pistaches) ça console, un peu. Un p'tit, quand même, hein.

Sar@h a dit…

10 semaines … C'est long de fait.
Désolée mais ma compassion va au (à la) collègue qui a l'enfant manifestement psychotique en espérant que son IEN n'a pas l'idée d'y ajouter une inspection. Ici, on est encore inspecté … présentement je ne suis pas sur la liste … mais une collègue l'a été vendredi après-midi, et un autre le sera la semaine prochaine.

Bon, je vais partir en apnée dans mes évaluations à corriger …

Tellinestory a dit…

@ Sar@h : en plein d'autres occasions et d'autres lieux, j'aurais non seulement compris mais partagé ta compassion.
Mais là, les symptômes de cet enfant ne sont pas apparus en juin, c'est une école où le RASED et moi-même passons plusieurs fois dans l'année, le gamin a passé des mois au coin sans que nous soyons au courant et l'école, à partir du moment où elle a décidé qu'elle ne pouvait plus tenir est tombée à bras raccourcis sur tout le monde, parents compris.
Donc là, non. Carton rouge.