1.8.09

Embarquement.


Le voyage en cargo, finalement, n'est rien d'autre qu'une forme de retraite laïque.
Comme à la Trappe, on y entrera avec l'espoir vif, un bagage bien trop abondant pour l'usage véritable qu'on en fera, la promesse fervente et naïve d'utiliser ce temps pour aborder enfin des territoires intellectuels trop longtemps négligé, un peu d'appréhension, un peu de coquetterie aussi.
Et comme au couvent, la question " comment vais-je penser au mieux durant ces deux semaines?", masquera des interrogations, infiniment plus prosaïques, mais certainement plus sincères : "Vais-je m'ennuyer, seule avec moi?", "Est-ce que je ne vais pas en avoir absolument assez au bout de deux jours?", et par dessus tout : " comment vais-je manger?"

Très bien.
Sobrement, abondamment et avec une régularité de métronome.

Par contre, je n'ouvrirai que rarement ma méthode de breton, pas du tout ma boîte d'aquarelle. Quand au livre de Damazio, je l'ai tout simplement oublié à terre.

Mais alors qu'ai-je fait?

J'ai regardé la mer, j'ai déniché tout les recoins à l'abri du vent mais exposé au soleil, j'ai pris des centaines de photos, j'ai parlé, peu, mais bien, dans un anglais aussi approximatif que celui de tout le monde.

J'ai écouté en moi, une somme considérable de minimes apaisements.

J'ai cherché des îles dans la brume légère, j'ai tâché de deviner la destination d'immenses bateaux dessinés sur la ligne d'horizon comme des jouets de grands.
Je ne me suis pas ennuyée une seule seconde.

Il ne s'est rien passé.

Rien, et pourtant, je vais tâcher de vous faire partager ces temps du cargo, temps d'ailleurs et d'autrement, temps marqués par l'attente, le rite et la veille. J'ignore absolument comment je vais m'y prendre, j'ignore ce qui vous parviendra, hors la mer, du vent, de la fascination du sillage sans cesse ourlé, de la vibration chaude et retenue des moteurs puissants, des gestes mesurés, de la parole brève et de la tâche bien faite.
Mais je vais essayer.

9 commentaires:

JEA a dit…

A votre retour sur le plancher des vaches, et sans doute pendant quelques jours, la mer est-elle restée en vous qui continuait à danser sous vos pieds ?
Sensation étrange d'une navigation qui se prolonge...

la bacchante a dit…

Il ne s'est rien passé et déjà tant de promesses de récits dans ce billet...

Agaagla a dit…

Si la méthode de breton et l'aquarelle ont si peu servi, c'est bien signe qu'il se passait autre chose, de sans doute bien plus nécessaire : les "minimes apaisements" valent toutes les occupations possibles.

Nous rêverons grâce à ce qui passe à travers tes mots (et les images) de ce voyage. Nous te suivrons dans ce récit en confiance. Allez, raconte...

Yves a dit…

Je suis admiratif* de ta capacité de partage de ce voyage au bord de l'humain.

* C'est moi qui écris, je mets qu'est-ce que je veux !

BC a dit…

Alors, embarquons avec toi puisque tu nous y invites....je suis sûre qu' il sera bien ce voyage bercé par tes mots .
Même pas pensé te demander si tu as eu le mal de mer .

Traou a dit…

Je suis heureuse de "la somme considérable de minimes apaisements". Ne serait-ce pas une merveilleuse définition des vacances, de "la vacance" (je préfère toujours utiliser ce mot au singulier). A très vite pour le constater de visu.

Adolfo Fernandez Penayo a dit…

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Tippie en Norvège a dit…

Il dit bien, Yves. :)

lyjazz a dit…

Tu illustres à merveille la phrase qui dit que l'important ce n'est pas le but du voyage, mais le voyage en lui même...